Quand l'influence américaine passe par le cinéma

Alexandre Astruc nous présente via son article un livre fort intéressant de Philippe d'Hugue. Cet ouvrage nous éclaire sur la politique de domination américaine qui comme le rappelle l'auteur passe par le cinéma (véritable vecteur de l'american way of life) dont les américain ont toujours confié la défense à des gens près du pouvoir (contrairement à nous)  et par Coca-Cola.L'article et le livre citent quelques chiffres éloquants:
en 1995 54 % de films présents sur le marché français étaient américains.
en 1997 il n'y a plus que 32 % de films français
en 1999 ce chiffre tombe à 27 %

Philippe d'Hugue va plus loin et dresse le tableau de l'étendue du désastre culturel qui nous guette ; à savoir la disparition de la langue française et de notre identité culturelle sous la pression des Mac Donald's, Coca Cola, Star Wars,  Lewis,  Reebok, Nike, Lucky Strike ou Marlboro... et autre denrées et produits insipides venant d'outre atlantique qui prônent et répandent le manichéisme et la pensée unique.

Le journaliste Alexandre Astruc cite dans son article cette phrase à méditer de Godard : "Les américains ont toujours attendu que l'Europe s'entre-tue pour intervenir ; ils sont venus quand tout le monde était fatigué, jamais au début ; ni en 1914, ni en 1940, tout ce qu'ils veulent c'est  envahir. Ils veulent envahir parce qu'ils n'ont pas d'histoire, ils ont besoin d'envahir ceux qui en ont."

L'article original:

QUAND L’INVASION AMERICAINE PASSE PAR LE CINEMA.(Le figaro Littéraire du Jeudi 28/10/1999, par Alexandre Astruc p.8)

Les accords Blum-Byrnes, les négociations du Gatt, l’AMI, tout le monde connaît ça par cœur ou devrait le connaître et, à ceux qui l'ont oublié, le remarquable essai de Philippe d’Hugues est là, pour le rappeler.

Bien que mathématicien de formation je ne crois pas aux chiffres, ni aux bilans, mais tous ceux fournis par Philippe d'Hugues sont à la fois éloquents et atterrants. En 1995, il y avait déjà, sur le marché français 54 % de films américains:; en 1997 il n'y à plus que 32 % de films français, et en 1999, cette proportion, dérisoire, tombe à 27 %. La machine de guerre du Cinéma américain est à l'œuvre : il y a eu plusieurs étapes dans sa progression.
Au début, ne pouvant supporter l’essor des cinémas nationaux, Hollywood s'est contenté de procéder par, l'importation des cerveaux. A la Suède elle vole Stiller et Garbo, et au même moment, jalouse des lauriers de la UFA, elle emprunte Lubitsh à l'Allemagne, puis, à la faveur de l'éclosion du nazisme, Fritz Lang, Pommer Ulmer.

Irène Selznick, la fille de Toms B.Mayer, et la femme de Selznick, m’a raconté à ce propos une histoire édifiante. Couverts de fleurs, somptueusement logés, nourris, les émigrés allemands se plaignaient de ne pas jouer. " Fifille, lui a répondu le vieux Mayer devant qui elle, se faisait l'écho de, leurs doléances, ces gens ont 100 %.de génie. Nous ne pouvons en utiliser que 25 % , il nous faut d'abord tuer les 75 % autres, ".
Mais, cela ne suffit déjà plus aux tycoon hollywoodiens. Il faut à la production américaine un empire sur tout, l'univers. Pas, un film européen, et surtout français, car dans ce combat impitoyable la France a toujours fait figure d’îlot de résistance. Le résultat, aujourd'hui est acquis : Bresson ne tourne plus depuis longtemps ; Carné avant de mourir n'a pu mener à bien sa Mouche ; Becker n’a dû qu’a l'aide vigilante de Melville de finir, avant de disparaître à son tour, son Trou ;- Clément, qui pourtant avait donné des, gages, a été réduit au chômage ; Clouzot est mort de désespoir lui aussi. Rien que des cadavres, tandis que triomphent les Jurassic-Park cet les Titanic.

Le, cinéma américain, autrefois cinéma d'auteurs et de metteurs en scène que nous avons toujours admiré et défendus, les Hitchcock, les Mankiewicz, les Walsh, les, Ford, est devenu un cinéma de techniciens d'effets spéciaux.

Mais, dans sa conclusion, dépassant le cadre du seul cinéma, qui pourtant nous tient à, cœur, Philippe d’Hugues, magistralement, élargit le débat et, nous montre l’étendue désastre , culturel, qui, au-delà des fast-foods et des Mc.Donald’s, nous guette : la disparition et de la langue française et de notre identité culturelle ; la menace, par l'intermédiaire de cette Europe fédéraliste qui, se :prépare, et qui pour l'Amérique n'est qu'une courroie commode de transmission, de la mort de notre patrimoine et de notre pays.

Nous nous sommes battus, pendant des siècles, pour ne pas devenir Anglais ou Allemands. Nous nous battrons pour que nos enfants ne deviennent pas Américains.

Pour finir, Philippe d'Hugues cite une phrase de Godard, ce trublion de génie. " Les Américains, dit Godard, ont toujours attendu que l’Europe s'entre-tue pour intervenir ; ils sont venus quand tout le monde était fatigué, jamais au début; ni en 1914 ni en 1940, Tout ce qu’ils veulent c'est envahir. Ils veulent envahire parce qu’ils, n'ont pas d’Histoire ils ont besoin d'envahir les gens qui en ont ".
Et Godard, ajoute, s'appropriant ,une vieille phrase de Giraudoux (" Les Etats-Unis n'ont jamais fait la guerre, ils n'ont fait que la guerre civile. ") " L’Allemagne a été le pays le plus proche des Etats-Unis. C’était leur concurrent dans le cinéma et dans et dans bien d’autres industrie. Il fallait qu’ils la réduisent à leur merci ".
A travers la mondialisation qui, bien plus que le gauchisme et les relents, soixante-huitards, alimente dans les conversations de salon ce politiquement correct, cette pensée unique dont nous, crevons, ce que les Etats-Unis - qui se veulent, au nom de la démocratie, les gendarmes du monde. - pourfendent, c'est notre identité en tant que nation. C'est un plan concerté, où le cinéma, véhicule de l'american way of life, tient la première place (ils en, ont toujours confié, contrairement à nous, hélas, la défense à des gens près du pouvoir).

Nous mourrons donc américain. Nous nous réfugierons dans nos fermes, de Touraine ou des Causses, nous nous boucherons les oreilles pour ne pas entendre leurs cris de triomphe.

Les Américains, à nous Européens, sont nos enfants, mais ils nous reviennent, à leur tour comme des envahisseurs, des occupants.
Ils ont laissé mourir de faim ce Poe que nous vénérons et qui nous, appartient un peu par le biais de Baudelaire, ils ont pendu Pound dans une cage de verre, si Faulkner à échappé à leurs ciseaux, c'est parce qu'il a eu le prix Nobel.

Nous égrènerons, leurs noms; dans nos souvenirs atterrants, sur ceux de Welles dont ils ont fait un clochard, de Nicolas Ray, qui de désespoir, s'est détruit dans l'alcool. Nous boirons, à leur santé, un dernier whisky, nous fumerons une ultime Lucky.
Et le linceul glacé d'une mort programmée viendra pour l’éternité recouvrir nos vieux os, sur cette terre de France, qu'ils, n'auront pas réussi à transformer en champ de colza, tandis que, dans le dernier des cinémas encore en ouvert aux films français, et qui sera un cinéma de répertoire, bien entendu, tournera la dernière bobine de Lola Montès, ou des Dames du bois de Boulogne.>/I>

L’envahiseur Américain : Hollywood contre Billancourt de Philippe d’Hugues Editions Favre, 119 Francs