Interview Véronique Chapuis Heropolis

Entretien avec Véronique Chapuis, directrice du MBA Intelligence Juridique, dans la newsletter Heropolis

Retrouvez dans la newsletter Heropolis, l’interview de Véronique Chapuis, Consultante en Intelligence Juridique, Fondatrice CEO de LEX Colibri, Directrice du MBA Exécutif d’Intelligence Juridique de l’Ecole de Guerre Economique (EGE) et Enseignante en Intelligence Juridique.

1. RELATIONS ENTRE LES SERVICES JURIDIQUES ET SÛRETE /SECURITE

Heropolis : Comment se déroulent, dans les grands groupes, les relations entre les services juridiques et sûreté/sécurité ?

Véronique Chapuis : Les services juridiques et sûreté/sécurité des grands groupes du domaine aérospatial, par exemple, ont des relations étroites car la maîtrise de tous les risques doit être assurée à tout moment avec une capacité à réagir rapidement sur l’ensemble de leurs composantes dont la composante juridique.

L’approche est duale de façon à couvrir autant les conséquences juridiques des risques opérationnels et business que les impacts business et opérationnels des risques juridiques (responsabilités, amendes, sanctions, etc.).
Un juriste peut siéger par exemple à une Commission Sécurité des Vols pour assurer la mise en place rapide de mesures juridiques si un incident se produit lors du vol d’un avion et pour faire le lien avec les assureurs.
La sécurité des personnes et des biens, étant primordiale, les échanges entre ces deux services sont réguliers et intègrent les autres services pour que chacun apporte sa pierre à l’édifice dans le but d’atteindre l’objectif de sécurité/sûreté du groupe.

Dans d’autres secteurs, la nature des relations peut varier : le service juridique peut être impliqué dans la prévention des risques pour l’émission d’avis juridiques. Autre exemple, il peut aussi intervenir pour la gestion des contentieux, c’est-à-dire sollicité en aval quand le risque s’est matérialisé dans un dommage, une perte ou un différend.

Le rattachement hiérarchique ou fonctionnel du service assurance a une influence dans la nature de ces relations. Si le service assurance est indépendant du service juridique, il peut avoir tendance à gérer les problèmes directement avec le service sûreté/sécurité, tandis que le service juridique sera sollicité uniquement pour « dire le droit » ou gérer un litige. S’il est intégré au service juridique, ce dernier sera plus impliqué dans la prévention.

En dehors des dommages aux biens et aux personnes et des risques contractuels, certains grands groupes ont étendu, principalement ces cinq dernières années, le champ des relations entre les services juridiques et sûreté/sécurité à de nouveaux risques tels que la protection du patrimoine immatériel et informationnel de l’entreprise – les informations sensibles et les secrets d’affaires -, la protection de l’environnement et des droits humains, la lutte contre la corruption et la cybercriminalité.

Globalement, on constate l’émergence de ces nouveaux risques, pas ou peu couverts par des assurances, qui nécessitent de concevoir de nouvelles mesures de prévention et de protection. « Les services sûreté/sécurité et juridique ont intérêt à développer leur collaboration ».

2. REDACTION D’UN PROCESSUS COMPORTANT LES ELEMENTS JURIDIQUES AU SEIN DE LA SÛRETE

Heropolis : Quels sont les éléments majeurs à prendre en compte lors de la rédaction d’un processus comportant des éléments juridiques au sein de la sûreté ?

Véronique Chapuis : Les éléments majeurs à prendre en compte pour la rédaction d’un processus de sûreté comprennent :

  • La qualification juridique des risques identifiés, quelle que soit la nature de ces risques. A titre d’exemple : quelle responsabilité en cas de pollution, de non-respect des droits humains, de rupture des approvisionnements ou que faire lorsqu’un personnel accompagne un client dans un pays en guerre pour faire des prélèvements miniers, quels sont les facteurs aggravants d’une responsabilité, comment l’entreprise peut-elle être taxée de mauvaise foi ou de négligence ? Etc.
  • L’identification des solutions en réponse à un risque juridique. Par exemple, une responsabilité illimitée dans un accord de confidentialité nécessite d’évaluer le niveau de sûreté, en général, et de sécurité informatique, en particulier, de l’entreprise. Si celui-ci est insuffisant pour protéger les informations confidentielles d’un client, il est préférable d’organiser la prestation dans l’environnement du client. Autre exemple, une entreprise ayant un risque particulier d’accidentologie aura intérêt à entretenir une relation régulière avec un avocat spécialiste en droit pénal pour lui permettre d’intervenir rapidement si besoin.
  • L’énoncé des situations qui doivent remonter au juriste pour information ou intervention.
  • L’organisation de la coordination entre les services : qui fait quoi, pour quoi, envers qui et à quel moment, qui doit informer qui, qui décide quoi.
  • Les preuves à collecter.

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