À l’instar de Pepsi contre Coca et de macOS contre Windows, le débat a toujours fait rage entre AMD et Intel. Dans la bataille des processeurs, beaucoup d’encre numérique, a coulé sur les forums en ligne, les sites Web de passionnés et les tableaux comparatifs pour savoir lequel est le meilleur pour la navigation occasionnelle, les jeux, le montage vidéo, etc. Pour mieux comprendre ces géants de la technologie et ce qu’ils peuvent vous offrir, examinons ce qui s’est passé au cours des dernières décennies.
Les premières années : Tout tourne autour d’Intel. Intel et AMD ont-ils toujours été aussi proches l’un de l’autre ? Non, Intel a un avantage historique et même aujourd’hui, si vous demandez à quelqu’un de nommer un processeur, il y a de fortes chances qu’Intel vienne à l’esprit en premier. Pendant la majeure partie du vingtième siècle, les progrès en matière de traitement informatique ont été principalement attribués à la société Intel. Fondée en 1968 à l’initiative de deux pionniers, Gordon E. Moore (chimiste) et Robert Noyce (physicien), Intel a pris d’assaut l’industrie des microprocesseurs, devenant un mastodonte de plusieurs milliards d’euros. En fait, cette société a même été accusée de monopolisation de l’industrie au point de faire l’objet de poursuites judiciaires.
Comparaison des deux concurrents
Années 70 et 80 : AMD fait son entrée sur la scène. Au milieu des années 1970, une autre société américaine, Advanced Micro Devices (AMD), a bouleversé la donne. Jusqu’alors, Intel n’avait fait que fournir ou concéder des licences pour la fabrication de processeurs destinés aux ordinateurs personnels et aux produits d’entreprise d’IBM. AMD est arrivé et a proposé des copies sous licence des processeurs Intel, ainsi qu’une fabrication de seconde source permettant à d’autres de développer et de vendre leurs propres conceptions de microprocesseurs. Soudain, les consommateurs et les OEM (fabricants d’équipements d’origine) ont eu le choix.
Années 90 : AMD passe à la vitesse supérieure, mais le résultat est-il révolutionnaire ? En plus de proposer des clones sous licence des processeurs Intel, AMD a lancé son propre processeur à architecture x86, l’AMD K5. Il était en concurrence avec le Intel Pentium mais au lieu d’offrir un design révolutionnaire, l’AMD K5 offrait une alternative moins chère. Les consommateurs soucieux de leur budget ont apprécié cette évolution, et qui sait combien de devoirs ont été faits sur des ordinateurs AMD bricolés par des écoliers enthousiastes.
2000 à 2010 : AMD commence à innover et obtient brièvement la réputation de « game changer ». Au début des années 2000, AMD a lancé ses propres processeurs Athlon et les experts en informatique se sont enthousiasmés pour les nouvelles fonctionnalités telles que le « cache L2 intégré » et la « mémoire vive à double débit ». Sur sa lancée, AMD devance Intel en lançant les premiers processeurs 64 bits en 2003 : Bienvenue dans le monde des Opteron et Athlon 64 bits ! L’Opteron était un processeur puissant de classe serveur qui rivalisait directement avec l’Intel Xeon. Le rapport qualité-prix favorable d’AMD a séduit les entreprises et les consommateurs, et il semblait alors qu’Intel allait enfin avoir une concurrence sérieuse… Puis l’innovation d’AMD a été coupée dans son élan.
2010 à 2016 : Intel prend de l’avance…pour un temps seulement. Au début des années 2010, AMD était loin derrière Intel dans la course à l’innovation. Les experts s’accordent à dire que les choses ont touché le fond avec « Bulldozer », le nom de code d’une nouvelle famille de microarchitectures AMD qui ont connu un échec spectaculaire : elles étaient lentes et consommaient beaucoup d’énergie. AMD a redoublé d’efforts pour ne produire que des puces bon marché, avec des performances moindres pour un prix inférieur. Paradoxalement, cela a conduit AMD à innover de nouveau, avec une approche modulaire ingénieuse basée sur les chiplets. Ces puces sont plus petites, utilisent moins de matériaux et sont plus simples à fabriquer. En outre, elles ont un design modulable, contribuent à réduire les déchets et, en ajoutant ou en soustrayant des chiplets, le processeur final peut être personnalisé pour répondre aux exigences prévues. En plus de ces avantages, AMD a commencé à réaliser des gains de performance, et l’écart avec Intel s’est progressivement réduit. La compétition s’intensifie.
2017 à aujourd’hui : AMD menace-t-il la supériorité d’Intel ? En 2017, le lancement des processeurs Ryzen d’AMD (avec ses nouvelles architectures Zen) a marqué un nouveau départ pour une informatique rentable et plus performante qui rivalise (presque) avec l’architecture Core d’Intel. En 2019, les processeurs Ryzen de la série Zen 2 d’AMD ont pulvérisé Intel en prenant de l’avance en termes de performances multithread et d’efficacité énergétique.
Certains experts comparent la rivalité Intel/AMD à la célèbre course entre le lièvre et la tortue. Intel, la « tortue », avance de manière continue et fiable, tandis que le « lièvre » AMD court par à-coups. Le choix entre la tortue et le lièvre dépend de nombreux facteurs, notamment le prix, les performances, le support des pilotes, la consommation d’énergie, la sécurité et les préférences personnelles.
Les deux concurrents ont fait des progrès rapides au cours des dernières années, et leur concurrence reste donc féroce. Intel a augmenté le nombre de cœurs de ses puces, tandis qu’AMD peut s’enorgueillir d’avoir réalisé des percées majeures dans sa technologie des transistors.
Si historiquement, chacun de ces processeurs avait un avantage irréfutable sur l’autre, avec les effets de la recherche et développement, les limitations de l’un par rapport à l’autre tiennent plus à des limitations volontaires ou des stratégies de prix, qu’à un retard technologique de l’un sur l’autre.
Avant d’aller plus loin, nous ne traiterons dans cet article que des processeurs dans le cadre exclusif de leur usage dans les PC (ordinateur portable) et les Desktop (ordinateur de table). Il y a d’autre enjeu qui touche aux supers calculateurs et au quantique que nous n’aborderont pas dans cet article.
On constate que les clients des processeurs ne sont pas les acheteurs mais les fabricants. En revanche, la performance commerciale sur le marché des équipements dotés de leur processeurs dépendra de la manière donc l’acquéreur final percevra les avantages de l’un par rapport à celui de l’autre.
Le sujet concernant la confrontation informationnelle implique les acteurs suivants : Les fabricants de composantes, les assembleurs, le circuit de distribution, les éditeurs, les prescripteurs, les acheteurs, les utilisateurs. Un circuit donc long et complexe où il est extrêmement difficile d’avoir une opinion figée. Dans cet article, nous nous intéresseront aux acteurs de la confrontation informationnelle uniquement sous l’angle de son impact sur les acheteurs et les utilisateurs.
Une confrontation classique dans un premier temps
AMD et Intel se sont affrontés dans des batailles juridiques et commerciales, notamment via des poursuites antitrust lancées par AMD entre 2005 et 2009, et accusant Intel d’avoir favorisé ses propres puces par des paiements à des fabricants pour écarter AMD.
AMD a allégué qu’Intel payait des fabricants comme Dell, HP, Acer, Lenovo, entre 2002 et 2006, pour qu’ils retiennent ou retardent le lancement de produits à base de processeurs AMD
Cela entre dans le cadre de réductions conditionnelles et menaces sur les acteurs de l’industrie. Ainsi, des remises étaient accordées à condition que les fabricants achètent exclusivement Intel, ou avec des quotas visant à exclure AMD. Certaines entreprises ont affirmé avoir subi des représailles financières ou perdu des rabais en cas de partenariat avec AMD.
En 2009, Intel a accepté de verser 1,25 milliard USD à AMD, dans le cadre d’un règlement global qui a mis fin à plusieurs poursuites sur les marchés mondiaux. En 2023, l’Union européenne a de nouveau infligé une amende de 376 millions € à Intel pour des « restrictions pures » (paiements conditionnels) visant à empêcher HP, Acer, Lenovo de lancer des PC AMD.
Intel a également utilisé sa capacité industrielle pour subventionner la production et inonder le marché afin de ralentir AMD, selon des analystes.
Mais pendant qu’Intel jouait sur sa puissance marketing et le réseaux OEM, AMD se concentrait plutôt sur l’influence numérique, la preuve technique, et la relation directe avec la communauté. AMD a exploité les médias, les benchmarks, les influenceurs, et les partenariats pour façonner la perception du public dans le cadre d’une véritable bataille d’opinion de portée stratégique.
Evolution des modes d’attaque
AMD et Intel se sont engagés dans une véritable confrontation informationnelle, notamment via des campagnes comparatives, le rôle indirect des influenceurs, les relations avec la presse, ainsi que les tactiques OEM-publicitaires.
Intel a beaucoup utilisé les benchmarks comparatifs, mettant en scène des chiffres sélectifs qui présentent ses puces comme meilleures que celles d’AMD — parfois sans grande transparence sur les conditions de test. Les publicités Intel sur les "grosses chaînes jouent sur l’émotion forte parfois avec des approches qualifiées par les critiques comme du « snake oil » ou de marketing manipulatoire.
AMD a multiplié sa présence digitale et en influence marketing (LinkedIn etc.) fin 2023/début 2024, valorisant ses processeurs AI avec un fort engagement. Cette approche de communication plus ciblée apparait comme plus authentique avec de petites histoires virales, des programmes de fidélisation comme RAPTR et des échanges directs avec la communauté.
Alors que Intel a conditionné des remises ou paiements aux fabricants (Dell, HP…), obligeant ces derniers à afficher son logo et à privilégier ses puces par le célèbre programme Intel Inside, AMD a peiné à obtenir une visibilité équivalente.
Les deux marques ont mis en exergue les failles de l’autre — sécurité (Meltdown /Spectre), chauffe, incohérences — pour asseoir leur crédibilité ou fragiliser l’adversaire. Les utilisateurs ont dénoncé des benchmarks truqués, qualifiant même certaines actions d’Intel comme « mensongères ». Dans ce contexte de confrontation informationnelle, AMD semble avoir marqué plus de points qu’Intel ce qui obligera ce dernier à réagir au début des années 2020.
Intel a réagi à la confrontation informationnelle lancée par AMD de manière stratégique, en combinant communication ciblée, innovations technologiques, partenariats solides et repositionnement marketing.
Aperçu de la réaction d’Intel face à la montée en puissance d’AMD
Intel a intensifié ses efforts de développement pour contrer la domination d’AMD sur plusieurs segments. Avec Alder Lake, Intel a introduit des cœurs "Performance" et "Efficiency", une réponse directe à l’efficacité énergétique d’AMD sur Zen 3 et Zen 4. Intel a aussi annoncé un nouveau plan ambitieux avec Intel 7, Intel 4, Intel 3, etc., pour regagner un avantage sur le plan de la finesse de gravure, là où AMD (avec TSMC) dominait. Toujours du côté de INTEL, Meteor Lake et Arrow Lake, prévus pour les prochaines générations, ont visét à démontrer un saut générationnel concurrentiel.
AMD ayant marqué des points avec ses comparatifs agressifs, Intel a répondu en réorientant son discours autour de l’expérience utilisateur, de la productivité et des performances dans des scénarios réels (et non seulement benchmarks synthétiques). INTEL a mis en en avant les optimisations logicielles, en particulier sur Windows et dans les jeux, grâce à des collaborations étroites avec Microsoft et les développeurs.
En insistant sur des cas d’usage pro et gaming, où les plateformes Intel restent dominantes (grâce à leur forte présence OEM et dans les laptops).
Intel a mis en avant des technologies propriétaires comme Thunderbolt, vPro, AMT, ou Evo, pour créer de la valeur ajoutée que les solutions AMD n'offrent pas toujours. Enfin, Intel a invité des influenceurs et des journalistes à des événements et sessions techniques pour expliquer sa roadmap. Ce travail visait à reconstruire sa réputation autour de la transparence technologique et la confiance dans le long terme.
Analyse du résultat de cette confrontation informationnelle
Pour savoir qui a le mieux réussi la confrontation informationnelle entre AMD et Intel, il faut analyser plusieurs dimensions : perception publique, adoption du marché, communication stratégique, et impact durable.
Voici une évaluation comparative :
AMD est passé de "l’alternative pas chère" à un leader technologique crédible avec les architectures Zen, Zen 2, Zen 3, et plus récemment Zen 4. AMD a toujours opté pour une Communication directe, agressive et claire. AMD procède à une utilisation efficace des benchmarks comparatifs face à Intel.
AMD a su profiter des faiblesses d’Intel entre 2017 et 2020 (difficultés sur le 10nm, stagnation des performances, retards). En s’appuyant sur un narratif David contre Goliath, cela a créé à la faveur de AMD un engouement émotionnel fort chez les consommateurs et les créateurs de contenu.
Intel n’est pas resté inerte et a engagé des actions de résilience et repositionnement sur la période 2021–2025. Ce qu’Intel a bien fait :
Contre-offensive technique crédible : Avec Alder Lake (12e Gen) puis Raptor Lake, Intel a montré qu’il pouvait reprendre l’avantage en gaming et lancer des architectures novatrices.
Reconstruction de l’image à long terme : Sous Pat Gelsinger, Intel a recentré sa stratégie sur un plan clair de roadmap (Intel 7 → 18A), une communication de leadership de fabrication (IDM 2.0), un ton plus humble, plus technique, moins marketing pur.
Marketing institutionnel puissant : Intel reste dominant dans les segments professionnels, OEM, gouvernement, où la confrontation informationnelle est plus discrète mais cruciale.
Identifier qui a gagné dans cette confrontation informationnelle n’est pas chose facile. Alors que la perception publique, la communication émotionnelle, semblent être à la faveur d’AMD, on note depuis 2022 une sorte d’égalité sur le narratif technologique. Intel a cependant une meilleure présence sur le marché et semble aussi positivement perçu sur sa capacité à anticiper le futur.
En résumé, AMD a gagné la confrontation informationnelle sur le plan de l’image, en bouleversant la perception du marché entre 2017 et 2022. Intel, cependant, a lancé une contre-offensive solide et pourrait regagner le terrain dans les prochaines années si ses roadmaps se concrétisent.
La confrontation informationnelle entre INTEL et AMD a de beaux jours devant elle car l’enjeu des processeurs dépasse largement le cadre des PC et des Desktop. Il s’étend sur les supercalculateurs et le monde du quantique qui est en pleine effervescence. Au-delà des propriétés intrinsèques de chaque processeur en fonction de chaque type d’usage, la confrontation informationnelle oblige chacun de ces deux acteurs à ne pas se limiter à ses seuls points forts mais à aussi à affaiblir le concurrent avec la panoplie des outils de la confrontation informationnelle.
Le futur de la concurrence AMD–Intel s’annonce plus serré, stratégique et segmenté que jamais. On entre dans une nouvelle phase de la rivalité, moins marquée par des "gros KO" techniques, et plus par une guerre d’écosystèmes, d’intégration verticale et de spécialisation.
On peut imaginer les trois années qui viennent une guerre fragmentée selon les segments en pleine émergence comme le Gaming, le IA et les supercalculateurs. AMD mise beaucoup sur Ryzen AI (NPU intégrés puissants), en avance en 2024–2025. Intel compte répondre avec Lunar Lake et Arrow Lake, intégrant des NPU et cherchant à dominer les AI PCs (segment sponsorisé par Microsoft).
Ibrahima Diagne (MSIE 47 de l’EGE)
Complément d’information sur cette étude de cas
Dans l’industrie des PCs, au-delà de la guerre des marques, de la définition graphique, de la mémoire, des fonctions de sécurité, des fonctions audio et vidéo ; il y’a un autre enjeu sur lequel chaque vendeur et expert a son opinion.
Sur le marché, les deux processeurs les plus connus dans l’industrie du desktop et du PC sont AMD et INTEL. Lorsqu’on fait des recherches pour comparer leur performance, on trouvera toujours des arguments contradictoires selon l’usage qu’on met en avant et selon les médias ou les articles.
Comment fonctionne un processeur sur un ordinateur PC ou portable ?
Dans ces deux catégories d’équipements informatiques, la fonction principale du processeur, c’est de fournir la puissance de calcul qui déterminera la performance des logiciels qu’on utilise. On constatera que toutes les marques d’ordinateurs ont des modèles qui intègrent parfois de l’Intel parfois du AMD. Donc il n’y a pas une marque d’ordinateur qui ne fait que de l’Intel ou qui ne fait que de l’AMD.
« Le processeur est le cerveau de l'ordinateur, il organise les échanges de données entre les différents composants (disque dur, mémoire RAM, carte graphique) et qui fait les calculs qui font interagir l'ordinateur avec vous et afficher votre système à l'écran. Sa puissance est exprimée en Hz. ».