Le référentiel en intelligence économique qu’Alain Juillet a fait réaliser cette année par un groupe d’universitaires et d’experts a déclenché un débat qui est sain et utile (cf dernier numéro de Sentinel). Ce référentiel est une étape importante de la naissance d’une culture de l’information à vocation opérationnelle. L’équation à résoudre est en effet complexe. Economie de subsistance par essence, la France n’a pas de stratégie de puissance géoéconomique. La projection vers l’extérieur relève du choix et non de la nécessité. La difficulté quasi insurmontable pour la majorité de nos entreprises (PME-PMI) de sortir de nos zones traditionnelles d’échange en est la parfaite illustration. Dans un pays où l’information est systématiquement assimilée au pouvoir qu’on détient sur autrui, le management de l’information n’aboutit pas au partage mais à la transmission des directives. L’entrée dans la société de l’information et la disparition de notre modèle d’économie de subsistance rendait impératif un changement de posture théorique et pratique à l’égard de l’information. C’est dans cet horizon que s’inscrit la démarche d’intelligence économique initiée depuis 15 ans en France. Le plan du référentiel est à la fois la résultante de nos blocages culturels et de nos besoins. Le dépassement des blocages culturels est une démarche difficile car il s’agit de transcender ce que nous sommes depuis des siècles. Pour réussir une telle opération, il est impératif de redonner aux étudiants des points de repère élémentaires sur la réalité des enjeux qui sont trop souvent polarisés autour de l’unique notion de développement. Il est temps de se rendre compte que la mondialisation des échanges n’élargit pas le marché mais le restreint à cause de ses conséquences sur les économies occidentales (désindustrialisation, taux de chômage élevé récurrent depuis 30 ans, démographie limitée, démultiplication des pays industrialisés et donc de la concurrence). Depuis des décennies, le monde de l’ingénieur s’est polarisé sur le développement et l’innovation alors que dans le même temps l’école de gestion américaine mutait vers une pensée duale combinant le développement et l’affaiblissement de la concurrence, en visant in fine la suprématie sur le marché mondial.
Ce découplage a atteint aujourd’hui son point limite avec la construction européenne. L’erreur que les promoteurs du oui à la constitution européenne sont en train de commettre, est de croire que les mots d’ordre «défense de la paix, du développement et de la sauvegarde de notre modèle social» sont suffisamment démonstratifs par leur évidence. Rien n’est moins sûr. Il va falloir se battre et pas simplement avec des déclarations de principe. Prenons l’exemple des fonds européens. Les régions françaises ont intérêt à intégrer la dimension intelligence économique, si elles ne veulent pas voir partir une proportion non négligeable des fonds européens vers les nouveaux pays entrants. Rappelons qu’une partie des fonds qui sont destinées à la France ne sont pas utilisés parce que les entreprises de notre pays ne savent pas encore les mobiliser à leur profit. Les sommes en question repartiront vers Bruxelles qui les réaffectera à d’autres destinataires. Nous atteignons dans ce dossier le comble de l’absurde. Il ne faudrait pas qu’un expert se mette à comptabiliser les sommes ainsi perdues car le total ne laisserait pas indifférent les électeurs qui s’interrogent encore sur le sens à donner à leur vote en mai prochain.
Chacun sent bien que si l’Europe n’est pas construite dans le sens d’une nouvelle puissance, elle sombrera dans les contradictions totalisées par les 25 pays membres. Le doute français s’alimente en partie à cette source. Il en est de même pour l’intelligence économique. Limiter le référentiel au management de l’information nous aurait conduit au même échec que le knowledge management, c’est-à-dire un beau concept qui débouche sur un échec quasi général dans son application dans les entreprises françaises. Que ce soit la filière textile de Midi-Pyrénées (la dernière qu’il nous reste dans sa totalité) ou la filière hautes technologies de Basse Normandie, le succès ne passe par seulement par une amélioration de l’utilisation de l’information dans les PME mais par un débouché stratégique des pôles de compétitivité impulsés par un Etat/stratège et par un management global de l’information. Il ne s’agit pas simplement d’innover mais d’affronter une concurrence sans état d’âme qui s’inscrit de plus en plus dans des jeux de puissance. A ce propos, il serait bon que les détenteurs du savoir faire libéral se souviennent que l’union fait la force. Cette maxime s’applique aussi à l’intelligence économique. L’opération de communication sur le dossier Gemplus que Bernard Carayon organise mercredi 6 avril en partenariat avec l’Ecole de Guerre Economique, s’inscrit dans cette philosophie de l’action.
Christian Harbulot
Ce découplage a atteint aujourd’hui son point limite avec la construction européenne. L’erreur que les promoteurs du oui à la constitution européenne sont en train de commettre, est de croire que les mots d’ordre «défense de la paix, du développement et de la sauvegarde de notre modèle social» sont suffisamment démonstratifs par leur évidence. Rien n’est moins sûr. Il va falloir se battre et pas simplement avec des déclarations de principe. Prenons l’exemple des fonds européens. Les régions françaises ont intérêt à intégrer la dimension intelligence économique, si elles ne veulent pas voir partir une proportion non négligeable des fonds européens vers les nouveaux pays entrants. Rappelons qu’une partie des fonds qui sont destinées à la France ne sont pas utilisés parce que les entreprises de notre pays ne savent pas encore les mobiliser à leur profit. Les sommes en question repartiront vers Bruxelles qui les réaffectera à d’autres destinataires. Nous atteignons dans ce dossier le comble de l’absurde. Il ne faudrait pas qu’un expert se mette à comptabiliser les sommes ainsi perdues car le total ne laisserait pas indifférent les électeurs qui s’interrogent encore sur le sens à donner à leur vote en mai prochain.
Chacun sent bien que si l’Europe n’est pas construite dans le sens d’une nouvelle puissance, elle sombrera dans les contradictions totalisées par les 25 pays membres. Le doute français s’alimente en partie à cette source. Il en est de même pour l’intelligence économique. Limiter le référentiel au management de l’information nous aurait conduit au même échec que le knowledge management, c’est-à-dire un beau concept qui débouche sur un échec quasi général dans son application dans les entreprises françaises. Que ce soit la filière textile de Midi-Pyrénées (la dernière qu’il nous reste dans sa totalité) ou la filière hautes technologies de Basse Normandie, le succès ne passe par seulement par une amélioration de l’utilisation de l’information dans les PME mais par un débouché stratégique des pôles de compétitivité impulsés par un Etat/stratège et par un management global de l’information. Il ne s’agit pas simplement d’innover mais d’affronter une concurrence sans état d’âme qui s’inscrit de plus en plus dans des jeux de puissance. A ce propos, il serait bon que les détenteurs du savoir faire libéral se souviennent que l’union fait la force. Cette maxime s’applique aussi à l’intelligence économique. L’opération de communication sur le dossier Gemplus que Bernard Carayon organise mercredi 6 avril en partenariat avec l’Ecole de Guerre Economique, s’inscrit dans cette philosophie de l’action.
Christian Harbulot