Les sociétés militaires privées

Jean-Jacques Cécile. Que nous raconte-t-il ? Malheureusement la même chose que les autres auteurs sur ce sujet (1). Ce livre, pour le moins très bien documenté, fait une liste quasi exhaustive des erreurs et crimes commis par les SMP, mais sans jamais donner de solutions permettant de régler les problèmes créés par ces dites sociétés. Ainsi, outre un parti pris qui pourrait l’avoir aveuglé (2), le livre déçoit en n’apportant pas de nouvelles pièces au « dossier ».

Les chiens de guerre de l’Amérique peut être appréhendé avec différentes grilles de lecture. C’est une œuvre critique qui explore profondément les arcanes constituant le milieu des SMP anglo-saxonnes. L’auteur met ainsi en exergue les points négatifs et les défauts de ces dernières, ainsi que les dangers inhérents à de telles structures placées en situation de conflits. Il le fait avec minutie et laisse entendre qu’il connaît les moindres détails des « affaires sales » non connues du public non averti.

L’autre angle d’analyse consiste à comparer ce qu’a pu faire l’armée française en opération extérieure ces dernières décennies, ou l’armée des Etats-Unis, déployée en Irak ou en Afghanistan, avec l’action menée par « les chiens de guerre » .

20 000 hommes certaines années en Irak) effectuant des centaines d’escortes par jour, sept jours sur sept et toute l’année, ont malgré tout ce que l’on peut dire, été à l’origine de très peu de bavures.

De plus, l’auteur ne fait pas assez de distinguo entre les acteurs situés en amont des sociétés militaires privées (politiques, businessmen et patrons) et les employés qui sont eux-mêmes, parfois, les victimes d’un capitalisme sauvage issu de cette globalisation et les premiers demandeurs d’une régulation plus sévère de ces sociétés. Il est a noter toutefois que l’auteur effleure cette problématique avec une teinte de misérabilisme dans son chapitre « la globalisation ou le mercenariat à vil prix » (3).

la logique économique à l’organisation de guerre », J-J Cécile rajoute que le personnel des SMP réalise que des « exactions commises au nom de la rentabilité font voler en éclat le vernis de respectabilité dont se prévalent les sociétés militaires privées » (4). Des propos pouvant prêter à sourire lorsque l’on voit des gouvernements occidentaux utilisant leurs armées, depuis des décennies à des fins politico-économiques (positionnement de nos troupes dans certains pays africains, intervention des Etats-Unis en Irak, etc.). L’évidence est que tout système observé à la loupe démontrera ses défauts et lacunes de façon exacerbée.

On ne peut pas nier l’importance que revêt la perte du « monopole de la violence légitime» (5)  par les Etats modernes en favorisant ce type de sociétés. La nature a horreur du vide, les SMP sont donc là pour le combler. Mais l’important n’est-il pas que la critique amène le débat sur la place publique afin de générer des solutions viables ?

SAM

(1) Quelques ouvrages sur le sujet : Xavier Renou (2007), La privatisation de la violence : mercenaires et sociétés militaires privées au service du marché, Edition Agone ; Philippe Chapleau (2005), Sociétés militaires privées : enquête sur les soldats sans armées, Edition du Rocher ; Olivier Hubac (2006) (sous le dir.), Mercenaires et polices privées : la privatisation de la violence armée, Edition Universalis ; Jean-Jacques Roche (2005), Insécurités publiques, sécurité privée ? : essais sur les nouveaux mercenaires », Edition Economica.

(2) J-J Cécile reste persuadé qu’un homme portant une arme ne peut être qu’un soldat représentant un Etat reconnu suivant la logique de la fonction régalienne.

(3) Page 181, « les chiens de guerre de l’Amérique : enquête au cœur des sociétés militaires privées » J-J Cécile, Edition nouvelle monde.

(4) Page 10, même ouvrage.

(5) Max Weber définit l’Etat moderne par le monopole de la violence physique légitime. Cela signifie qu’ en interdisant l’usage privé de la violence, l’Etat se réserve l’exclusivité du recours à la violence, ou à la contrainte justifiée, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières.

 

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