La dimension subversive de l’information

Un rapport de force informationnel est gradué le plus souvent en fonction de la puissance du fort (modèle de suprématie informationnelle des Etats-Unis, influence outrancière des magnats de la presse à l’image de l’empire Murdoch, rayonnement mondial des chaines d’information du type CNN ou Al Jazeera). Les moyens financiers, technologiques et humains du fort lui donnent en apparence une position de force inaccessible et presqu’inattaquable. Cette perception ne reflète pas toujours la réalité.

Trois récents faits d’actualité, sans lien entre eux, mettent l’accent sur la capacité de frappe du savoir faire subversif dans la société de l’information :

- L’exploitation de l’affaire Snowden par la Russie. Vladimir Poutine a su retourner le piège informationnel américain (dénonciation du non respect de la démocratie par Poutine) en faisant en sorte que Snowden rencontre des avocats russes qui plaident régulièrement dans les affaires judiciaires où sont incriminés des adversaires du régime. Il a par cette manœuvre habile fait glisser le cas Snowden dans la catégorie Défense des Droits de l’Homme, mettant ainsi en porte-à-faux le système d’influence que les autorités américaines essaient de développer sur le sol russe pour affaiblir la légitimité de Poutine.

- L’occupation de la centrale du Tricastin par Greenpeace. Les activistes de la branche française de l’ONG ont une fois de plus fait la démonstration de l’incapacité d’EDF à empêcher l’intrusion de personnes sur un site de centrale nucléaire. Cette démonstration répétitive a le mérite de rappeler que les mesures adéquates (si souvent annoncées après coup) ne sont pas prises pour éviter ce type d’intrusion et que le temps d’intervention de la gendarmerie est beaucoup trop long pour faire face à une attaque brutale menée par des éléments plus agressifs d’un groupe terroriste.

- La continuité des actions d’agit-prop menées par des opposants au mariage pour tous notamment lors du défilé du dernier 14 juillet. Il est particulièrement rare qu’un Président de la République se fasse huer par des manifestants lors de cette fête consensuelle. Ces sifflements et ces huées étaient audibles en direct sur TF1 alors que le silence des commentateurs de l’évènement accentuait le malaise d’une information officielle filtrée et donc censurée.

Dans ces trois cas de figure, le faible (Poutine par rapport à Obama, Greenpeace par rapport à EDF, les opposants au mariage pour tous contre l’actuelle gouvernance au pouvoir) marque des points significatifs contre le fort. Cette tendance n’est pas factuelle. Elle souligne le cadre particulier de cette guerre de l’information qui échappe lentement mais surement aux systèmes figés sur le contrôle et incapables de s’adapter au mouvement.