Depuis plusieurs semaines, des manifestants hongkongais majoritairement étudiants, demandent au gouvernement chinois l’organisation d’élections libres avec des candidats non sélectionnés à l’avance par un comité de nomination. Il n’a pas fallu longtemps aux organes officiels chinois pour prendre les mesures nécessaires au filtrage des informations afin d’éradiquer toute propagation d’idées. Comme le montrent BlockedInChina et GreatFire, la plupart des réseaux sociaux ont été censurés par le gouvernement chinois. Dans le pays, aucune information n’a filtré dans les médias, à la demande du ministère de la propagande. Le quotidien du peuple reste très évasif mais sur Internet, c’est une autre histoire. Ce n’est pas la première fois que la Chine doit faire face à une guerre de l’information. À partir des années 90, cette dernière a su se construire une méthode principalement basée sur la désinformation et le filtrage au lieu de la seule répression violente automatique. Les exemples récents du Tibet, où la Chine prétendait défendre des immigrés han victimes de la violence des rebelles Tibétains à Lhassa, et du Xinjiang, coupé numériquement du monde durant des émeutes, démontrent sa manière de procéder en termes de communication et de censure. A l’ère du numérique, chaque circuit de communication est éteint, les télécommunications sont bloquées, les accès à Internet coupés et les contenus, lorsqu’ils existent, sont filtrés. Mais le problème auquel l’empire du milieu doit faire face aujourd’hui est un conflit se déroulant sur une île stratégiquement très importante ou de nombreuses entreprises et expatriés sont présents. L’impossibilité de tout couper, sous peine de tuer des activités économiques et industrielles dont elle ne peut se passer, change la donne du conflit actuel. Principalement pour cette raison, le monde entier peut suivre les évènements qui se déroulent depuis le mois de septembre dans l’une des plus grandes places financières du monde. En plus des façons connues pour contourner les blocages sur Internet, les manifestants ont commencé à utiliser une application, FireChat, qui permet de communiquer sans être connecté à Internet, grâce à une architecture de réseau maillé (mesh) utilisant des technologies radios (bluetooth, wifi). Cette application avait déjà été largement utilisée par le peuple irakien en juin 2014. L’effet de groupe a fait son travail. Un grand nombre d’opposants l’a téléchargé. Ainsi, les frondeurs présents en première ligne ont pu transmettre, en temps réel, l’actualité du mouvement à ceux qui pouvait outrepasser la censure et poster sur des réseaux sociaux, comme Twitter, Facebook ou Instagram. Il est intéressant d’observer le fonctionnement de la censure en Chine où les éditeurs locaux de logiciels d’automatisation de blocage font du service sur mesure aux fournisseurs d’accès ou aux sites susceptibles d’héberger des données, parfois avec l’aide d’entreprises occidentales reconnues lorsqu’elles n’y sont pas contraintes par le droit chinois. Une récente étude de Gary King, chercheur et professeur à Harvard, démontre de façon détaillée comment fonctionne ce système. Certains outils sont automatiques mais d’autres font appel à des censeurs humains pour filtrer les informations. Évidemment, ces systèmes fonctionnent efficacement contre des technologies identifiées et maitrisées. Finalement, l’utilisation d’une application telle que FireChat démontre une chose : que la principale faiblesse d’un système de censure numérique réside dans la rapidité avec laquelle l’innovation se crée, se répand et s’adapte.