Les interrogations sur la gestion des attentats du 13 novembre doivent-elles rester sans réponse ?

L’appareil d’Etat aurait-il fait preuve d’incohérence lors de la phase d’intervention durant les attentats du 13 novembre ? Deux problèmes dominent ce qui n’est pour l’instant qu’une rumeur dont le Journal du Dimanche a rendu compte le dimanche 24 janvier 2016 : la question de l’intervention du Raid au bataclan et l’organisation du traitement des blessés.

Deux ratés ?
Concernant le premier problème, le GIGN aurait été capable d’intervenir au Bataclan deux heures avant le Raid (l’unité spécialisée de la police nationale). Il ressort de ce constat une polémique alimentée par les syndicats de police (la Fédération autonome des syndicats du ministère de l'Intérieur et du Syndicat des commissaires de la police nationale) qui ne supportent pas la portée d’une telle affirmation. Indépendamment de cet évènement, il existe une opposition entre la police et la gendarmerie qui dessert fondamentalement l’intérêt des citoyens de ce pays.
Au-delà des traditionnelles questions corporatistes, il devient urgent qu’une autorité politique digne de ce nom prenne enfin les décisions qui s’imposent. A commencer par l’organisation du renseignement. Il est devenu intolérable que le lobby policier continue à s’opposer à la création d’une véritable sous-direction du renseignement (et nommée officiellement comme telle) au sein de la gendarmerie. La gendarmerie couvre une partie importante du territoire. Comment expliquer le refus d’une partie de la police à admettre une telle évidence ?
Le second problème porte sur la question du traitement des blessés. Les blessés ont été orientés sur deux centres de traitement alors qu’il existait d’autres centres dans la zone Paris-Ile de France, prêts à les accueillir. Cette nuance n’est pas anodine. L’afflux des blessés était tel ce jour-là qu’il y a eu un effet de saturation. Le temps disponible pour opérer était limité. Il a fallu amputer beaucoup d’entre eux. Si la répartition avait été mieux faîte, des blessés auraient pu éviter l’amputation dans la mesure où les équipes chirurgicales en renfort auraient permis de limiter le recours à une « chirurgie de guerre » d’un autre âge.

Anti-terrorisme : l’heure du bon sens
Nous sommes en 2016 et en situation d’Etat d’urgence contre une menace dont il est difficile de prévoir l’évolution. Il est donc évident que l’appareil d’Etat doit optimiser le rendement des moyens dont il dispose pour assurer au mieux la sécurité de la population française. Le lobby policier exerce aussi une pression très forte sur les militaires qui sont mobilisés dans le cadre du plan Vigie Pirate. Les officiers responsables des militaires déployés sur le terrain sont englués dans une véritable procédure bureaucratique afin d’expliquer l’éventuelle intervention de leurs hommes. On peut comprendre ce système de contrôle dès lors qu’il n’aboutit pas à une logique kafkaïenne. Le lobby policier manifeste à cet égard un zèle qui ne correspond pas toujours à la nécessaire adaptation qu’il doit lui-même prendre en compte en fonction des évènements. Que ce soit dans ses rapports avec la gendarmerie ou l’armée, la police doit comprendre que c’est l’intérêt général qui prime sur ses propres intérêts. Cette question n’est pas encore rentrée dans le débat politique mais une telle éventualité n’est pas à exclure compte tenu des enjeux. Combien de personnes auraient été sauvées si l’intervention sur le Bataclan avait été plus rapide ? Les citoyens de ce pays sont en droit de le savoir. Et il faut espérer qu’ils n’aient pas à se reposer les mêmes questions dans l’avenir.