Evaluation de la puissance sanitaire globale de la France

La France avait à la fin des années 70 une industrie pharmaceutique performante et un système de santé encore à la hauteur des besoins de la population. Mais la nouvelle gouvernance qui prend le pouvoir en 1981 se polarise sur une vision idéologique et passe à côté de deux enjeux majeurs : la mutation de l’économie de la santé et l’évolution des demandes sociétales. Le monde privé s’est quant à lui polarisé sur le triptyque profits/marché/finances. Ce découplage entre les besoins d’un pays et la dynamique commerciale découlant de la mondialisation a généré trois maux essentiels : la dépendance à l’égard de l’importation de médicaments, la déconstruction du système hospitalier, l’incapacité d’identifier les besoins sanitaires vitaux de la population.

La nécessité de réécrire une grille de lecture

L’étude des dispositifs de projection de puissance de la France dans le domaine de la santé se caractérise d’abord par des stratégies gouvernementales, des politiques publiques sous-jacentes et des perceptions évolutives à l’international. La sécurité sociale, par exemple, porte la symbolique de la dualité puissance/bienveillance régalienne, et ce malgré un déficit budgétaire et une augmentation des pratiques frauduleuses qui l'affaiblissent. Parallèlement à ses efforts de résilience sanitaire intérieure, la France se doit de projeter ses stratégies d’accompagnement et d’investissement vers les Start-up et PME prometteuses au même titre que vers l’enseignement supérieur et la recherche universitaire. La France s’illustre en partie par la force de sa diplomatie sanitaire, tant dans les hémicycles des organisations internationales qu’au sein des ONG auxquelles elle apporte son soutien. Mais cette légitimité à l’échelle globale ne peut être assurée que grâce aux capacités industrielles conséquentes qui accompagnent l’économie sanitaire française.

L'impératif d'une nouvelle vision industrielle en partie relocalisée

Il faut pour cela s’attarder sur les dynamiques au sein du marché mondial, ainsi que sur les facteurs versatiles de souveraineté sanitaire et de puissance industrielle. La France dispose d’une industrie ayant un rayonnement mondial dans le secteur pharmaceutique. La balance commerciale du médicament est la quatrième source de revenu pour la France. Néanmoins, des années de mesures administratives lentes et restrictives, un marché offrant peu d’opportunités selon les startups et le manque d'investisseurs ont eu un double effet : l'externalisation et la délocalisation croissante des activités des industries de santé en Asie et le départ de startups espérant trouver outre Atlantique des marchés plus propices et des investisseurs plus généreux. Pour contrer cela, trois volets : reconquête industrielle via la biotechnologie (domaine d’avenir et manne financière), financement et accompagnement efficace de la filière R&D et réindustrialisation et relocalisation pour récupérer une autonomie sanitaire et industrielle face à la fragilisation de la supply-chain mondialisée. L’ensemble de ces axes techniques stratégiques se doit de prendre en compte l’enserrement numérique grandissant et nécessaire des activités industrielles.

Le défi de maitriser les technologies de l'information de la santé

Cependant les évolutions numériques doivent faire face à une réglementation parfois hostile et à des cybermenaces récurrentes. Si la France doit utiliser le numérique pour s'imposer sur la scène internationale, l’accessibilité aux données et les innovations de l’e-santé peuvent constituer des vulnérabilités exploitables par des adversaires stratégiques. La digitalisation comporte aussi bien des enjeux réglementaires que des risques numériques. Les cyber-attaques contre le système de santé national représentent un risque systémique pour les intérêts stratégiques français.

 

Alexandre Brans, Tiphaine Dieudonné, Pierre Parant, Céline Clovis, Bastien Humbert, Julien Proto, Maxime De Lataillade, Léa Merveilleau, Rayane Rostom

 

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