Face à la croissance exponentielle des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) liée à l’intégration des technologies innovantes et à l’élargissement de leur gamme de services pour détenir une place de quasi-monopole sur le marché européen (acquisition en 2011 par Microsoft de skype pour 8,5 milliards de dollars, rachat en 2014 par Google de DeepMind pour environ 500 millions de dollars, rachat en 2018 par Apple de Shazam, pour environ 400 millions de dollars), la Commission européenne a, dès 2014, mené une réflexion sur la question du Digital Markets Act (DMA) pour réguler les activités des GAFAM, assurer une concurrence loyale et préserver la souveraineté numérique de l’Europe.
Le 4 juin 2020, la France et l’Allemagne, soutenues par l’UE, ont lancé le projet Gaia-X, visant à développer un cloud souverain européen pour réduire la dépendance aux services de cloud des GAFA (Amazon AWS, Microsoft Azure, Google Cloud) pour créer une alternative européenne aux services de cloud computing dominés par Amazon Web Services (AWS), Google Cloud et Microsoft Azure.
Le 15 décembre 2020, sous l'impulsion du commissaire Thierry Breton, l'Union européenne, a proposé deux règlements : le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA).
L’objectif du DMA est de soumettre davantage les grandes plateformes du numérique au droit de la concurrence en prévoyant un cadre plus précis notamment en matière d’abus de position dominante. Le DSA vient compléter le RGPD, qui, dans son article 9, interdit le traitement de catégories particulières de données à caractère personnel, sauf exceptions spécifiques.
L'article 26 du DSA a renforcé les protections déjà établies par le RGPD en interdisant spécifiquement l'utilisation des données sensibles pour le ciblage publicitaire, contribuant ainsi à une meilleure protection de la vie privée des utilisateurs en ligne.
Les GAFAM ont initié une guerre informationnelle en raison notamment des obligations de transparence des algorithmes imposées par le DSA, considérant ce règlement comme une menace pour leur modèle commercial basé sur la collecte extensive de données des utilisateurs et sur les publicités ciblées.
À cet égard, selon Amazon, les exigences du DSA sur la transparence des algorithmes risquaient de perturber ses processus de recommandation de produits qui reposent sur des algorithmes complexes pour personnaliser l’expérience d’achat réduisant ainsi son avantage concurrentiel et pourrait nuire à son modèle économique basé sur les données et les publicités ciblées.
Selon Apple, le DMA pourrait entrainer des risques de sécurité et des vulnérabilités potentielles associées à l’ouverture de l’App Store aux applications tierces.
Déjà, quelques mois avant la proposition de cette réglementation, les GAFAM ont mené une guerre informationnelle intensive sur tous les échiquiers politique, économique et sociétal, l’objectif principal étant de limiter les contraintes imposées par le DMA et le DSA.
Le DSA et le DMA sont respectivement entrés en vigueur les 17 février et 6 mars 2024.
https://digital-markets-act.ec.europa.eu/about-dma_en
Les GAFAM ont mené une guerre informationnelle intensive contre le DMS et le DSA sur tous les fronts.
Entre 2020 et 22024, les GAFAM ont mis en place un puissant lobbying auprès des institutions européennes en mobilisant des groupes de pression à Bruxelles.
A cet égard, le 28 octobre 2020, le Point révélait un document intitulé "DSA 60-Day Plan Update", dans lequel Google détaillait une stratégie de lobbying intensive visant à modifier le DSA pour protéger ses intérêts économiques. Ce document exposait des actions ciblant les membres du Parlement européen et de la Commission européenne pour influencer le processus législatif.
Sur l’échiquier politique
Dans une enquête du 23 avril 2022, Corporate Europe Observatory and LobbyControl mettait en lumière des documents démontrant que Google, Amazon, Apple et Facebook ont déployé des stratégies de lobbying pour atténuer les impacts du DMA et du DSA.
Leur influence s’est matérialisée par leur présence à 75 % dans les réunions concernant le DMA et le DSA. Leur présence régulière a permis aux GAFAM de faire valoir leur position directement auprès des principaux décideurs européens.
Influencer les décisions politiques prises à Bruxelles a un coût. Selon un rapport de 2021, les GAFAM ont dépensé collectivement près de 100 millions d'euros par an pour les activités de lobbying au sein de l'Union européenne, Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft représentant à eux seuls 32 millions d'euros.
Le 3 septembre 2020, Google a remis sa réponse à la consultation de la commission européenne dans un rapport intitulé « Google’s Response to the Digital Markets Act Proposal ».
Le 22 janvier 2021, Google soumettait une réponse à la consultation publique du Department of Enterprise, Trade and Employment (DETE) de l’Irlande. Cette consultation, lancée le 4 janvier 2021, visait à recueillir les avis des parties prenantes sur ces règlements.
Dans cette réponse, Google exprimait son soutien à l’objectif de la Commission européenne de promouvoir un internet responsable et reconnaissait la nécessité d’un cadre réglementaire clair pour les plateformes numériques tout en exprimant ses préoccupations sur les dispositions susceptibles de rendre plus difficile le développement de nouveaux produits destinés aux petites entreprises et de diminuer la capacité des entreprises à offrir de nouveaux services aux consommateurs européens.
Dans sa réponse à la consultation publique organisée par la Commission remise le 31 mars 2021, Microsoft a accueilli favorablement le Digital Services Act tout en suggérant d’adapter les obligations à chaque type de plateforme pour éviter d’une part, les contraintes inutiles et d’autre part, les obligations disproportionnées sur la transparence, la surveillance et l’accès aux données.
Dans sa réponse à la consultation publique concernant le DMA du 3 mai 2021, Microsoft, a, tout en partageant l’objectif de la Commission de créer un marché numérique équitable pour favoriser l’investissement, l’innovation et la croissance des entreprises, appelé à ce que ce règlement soit mieux ciblé, plus précis en insistant sur la nécessité d’une régulation équilibrée pour éviter les abus des gatekeepers.
Sur l’échiquier économique
Les entreprises européennes ont été les relais de la guerre informationnelle des GAFAM. Elles sont fortement tributaires des outils proposés par les GAFAM, ont soit, apporté indirectement leur soutien lorsqu’elles ont été citées dans les différentes communications des géants numériques, soit directement en mettant en avant les atouts des GAFAM.
Le 16 juillet 2020, quelques mois avant la proposition d’adoption des règlements, Google a cité Carrefour sur son site Google Cloud comme un exemple de modèle de développement numérique réussie, illustrant ainsi l’aide aux entreprises européennes à rester compétitives.
De même, la société Française BlaBlaCar, leader mondial du covoiturage longue distance, a migré son infrastructure vers Google Cloud, répondant aux besoins des utilisateurs en temps réel. Ainsi, sur son site internet, Google Cloud a fait état des défis surmontés avec Blablacar.
S’agissant de la participation directe des entreprises européennes à la guerre informationnelle des GAFAM, Siemens a, dans un communiqué de presse du 19 avril 2021, évoqué la collaboration avec Google pour intégrer des technologies de machine learning dans les processus industriels de la société allemande.
Dans une vidéo publiée le 17 décembre 2021, AWS a fait intervenir le Zoo parc de Beauval pour vanter l’efficacité de leur collaboration dans le développement des infrastructures numériques de la société et pour l’accompagner face à un nombre croissant de visiteurs.
La société Renault a aussi collaboré avec Google pour intégrer des technologies de machine learning et d’intelligence artificielle dans ses usines et a pu optimiser la production grâce à Google Cloud.
Dans un communiqué de presse publié sur son site le 8 novembre 2022, Renault a évoqué le succès de ce partenariat et précisé que les solutions cloud et les outils d’intelligence artificielle peuvent transformer l’industrie automobile européenne.
Les GAFAM ont initié des programmes en faveur des PME et des Startups françaises européennes
Le programme "Amazon Small Business Accelerator" a été lancé en juin 2020 par Amazon en partenariat avec le réseau de soutien aux petites entreprises « Enterprise Nation », pour aider les petites entreprises et les startups britanniques à développer leurs activités en ligne. Ce programme offre une formation en ligne gratuite à 200 000 entreprises, comprenant des outils numériques, des diagnostics de croissance et des avantages tels que des crédits AWS. De plus, un bootcamp intensif d'une semaine est proposé à 1 000 entreprises principalement hors ligne pour les aider à se digitaliser et à vendre en ligne.
A partir du 1er juillet 2020, Google a proposé un nouveau site dédié aux TPE-PME baptisé “Grow with Google” pour développer leur activité numérique. L’objectif est de les aider à augmenter leur visibilité sur le Web et de mieux distribuer leurs services et produits. Ce programme avait pour objectif d’aider les PME à transiter plus facilement vers le numérique.
Google n’est pas le seul à avoir saisi l’opportunité de proposer ses services suite à la pandémie.
Meta a aussi lancé le programme "Boost with Facebook" pour aider les petites entreprises européennes à utiliser ses outils publicitaires et affirmé que les régulations comme le DMA pourraient limiter l’efficacité des publicités ciblées.
Certaines organisations professionnelles ont également apporté leur soutien aux GAFAM
Plusieurs organisations professionnelles ont défendu les GAFAM en soutenant que la nouvelle réglementation européenne pouvait engendrer une perte de compétitivité des entreprises.
Le 10 novembre 2021, Euro Commerce a publié sa contribution au DSA. Il a soutenu le Digital Services Act dans ses objectifs généraux de transparence et de protection des consommateurs, mais a appelé à des ajustements pour éviter des contraintes excessives pour les commerçants.
Cette organisation est favorable à des règles plus strictes pour lutter contre les vendeurs illégaux et renforcer la responsabilité des plateformes notamment avec le principe "Know Your Business Customer" tout en dénonçant une régulation trop lourde qui pourrait pénaliser les petites entreprises et fragmenter le marché unique européen.
L’IAB Europe (Interactive Advertising Bureau), association professionnelle représentant l'industrie de la publicité numérique en Europe, regroupe les acteurs utilisant les plateformes publicitaires des GAFAM.
Dans un communiqué du 25 avril 2022, l’IAB Europe a évoqué la vigilance du secteur de la publicité numérique face aux régulations européennes, notamment s’agissant de l'encadrement de l'utilisation des données des utilisateurs pour la publicité ciblée.
Sur l’échiquier sociétal
Le 20 janvier 2020, Facebook a commandé une étude au cabinet Copenhagen Economics pour mesurer l'impact économique de ses applications en Europe. Selon cette étude, les entreprises qui utilisaient les applications de Facebook ont généré des ventes estimées à 208 milliards d'euros en 2019 et environ 3,1 millions d'emplois. De plus, ces entreprises ont réalisé des exportations estimées à 98 milliards d'euros, dont 58 milliards au sein de l'UE et 40 milliards vers le reste du monde. Cette étude souligne le rôle crucial des réseaux sociaux dans la croissance des PME européennes en particulier pour l'accès à de nouveaux marchés et l'amélioration du service client.
En 2021, Facebook a financé un rapport du Lisbon Council intitulé « The Economic Impact of Social Media Platforms in Europe » dans lequel la start-up Française Laflore Paris, spécialisée dans la maroquinerie, a été mentionnée pour montrer l’impact économique positif de Facebook.
À la demande de Google, le même cabinet, Copenhagen Economics a publié en juin 2021 une étude intitulée « Study of DMA Implications on EU External Trade ». Cette étude a examiné les effets potentiels de certaines dispositions du DMA sur les entreprises européennes, s’agissant de leur capacité à exporter. Cette étude a suggéré que certaines obligations pourraient, dans certains cas, limiter les fonctionnalités des services de plateformes numériques, et donc affecter la productivité et la compétitivité des entreprises de l'UE.
Les GAFAM s’appuient sur des Think-Tanks et des groupes de recherche pour légitimer leur opposition à la réglementation européenne
Les GAFAM ont travaillé en étroite collaboration avec des think tanks européens pour influencer le débat public et les décisions politiques portant notamment sur le Digital Markets Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA). Cette collaboration visait à présenter une opposition plus crédible et locale aux régulations pour façonner le débat public et les décisions politiques en faveur des intérêts des grandes entreprises technologiques.
Ces institutions ont joué un rôle crucial en fournissant des analyses, en organisant des débats et en influençant les politiques publiques à travers l’Europe.
Renaissance Numérique, think tank français axé sur la transformation numérique de la société et bien que son conseil d'administration comprenne des cadres de grandes entreprises technologiques, telles que Huawei, Microsoft, Google et TikTok, a néanmoins publié en mars 2021 une analyse critique du Digital Markets Act (DMA) intitulée « Digital Markets Act : une révolution ou une contradiction juridique ». Ainsi, tout en reconnaissant la nécessité de réguler les grandes plateformes numériques pour assurer une concurrence équitable, Renaissance Numérique a appelé à une clarification des dispositions du DMA afin d'éviter des contradictions juridiques et de préserver l'innovation au sein du marché numérique européen.
Le Centre for European Policy Studies (CEPS), établi à Bruxelles, un think tank indépendant qui se consacre à l'étude des politiques européennes, fournit des analyses et des solutions aux défis auxquels l'Europe est confrontée. Dans son article du 17 février 2025, le CEPS a admis l'importance du DSA et du DMA pour encadrer les marchés numériques européens.
Toutefois, il a insisté sur la nécessité d'une coordination réglementaire efficace et d'une harmonisation des politiques pour garantir que ces législations atteignent leurs objectifs sans entraver l'innovation ou créer une fragmentation au sein du marché unique européen.
Les GAFAM s’appuient sur des études et des rapports des cabinets d'audit et de conseil américains.
Ces études mettent en évidence l'impact positif des plateformes publicitaires numériques, comme celles de Meta, sur les PME européennes, en facilitant leur accès à de nouveaux marchés et en améliorant leur performance économique.
Le Center for Data Innovation a publié le 22 novembre 2021 une étude dans laquelle elle a fait part d’un sondage de Deloitte mené auprès de 30 000 PME dans 18 pays, la majorité des entreprises considérant que les publicités personnalisées sont beaucoup plus efficaces que les publicités traditionnelles. Cette efficacité accrue permet aux PME de cibler des audiences pertinentes de manière rentable contribuant ainsi à leur croissance et à leur compétitivité.
En avril 2023, PwC a réalisé une étude commandée par Amazon intitulée « Amazon’s Economic Impact in Europe » mettant en avant l’impact économique positif de l’entreprise en Europe. Elle a établi que les régulations, comme le DMA risquaient de nuire à la croissance des PME européennes utilisant Amazon pour accéder à des marchés internationaux.
Si Les GAFAM ont maintenu une guerre informationnelle après l’entrée en vigueur des réglements, l’Europe a su contre attaquer.
Malgré les tensions, l'UE a maintenu sa position sur la régulation numérique face aux pressions des géants technologiques. Des initiatives politiques européennes ont insisté sur le besoin de revoir certaines régulations pour encourager l'innovation en appelant au respect d’un équilibre entre la régulation et la compétitivité.
Le 12 mai 2023, la Commission européenne a tenu la réunion inaugurale du groupe de haut niveau sur le Digital Markets Act. Ce groupe a rassemblé des représentants de divers organismes européens et réseaux nationaux pour discuter de questions d'intérêt commun concernant la mise en œuvre du DMA. L'objectif principal de ces réunions est d'assurer une application cohérente et complémentaire du DMA en collaboration avec d'autres régulations sectorielles.
Les GAFAM ont utilisé des stratégies pour maintenir leur domination sur le marché européen, telles que le “sovereignty-washing”, qui consiste à afficher un respect apparent des normes européennes tout en conservant une influence sur les données et les infrastructures locales. Cette approche complique les efforts de l’Europe pour développer une infrastructure numérique indépendante et protéger ses données sensibles.
Le 6 septembre 2023, Google a publié un article intitulé « Building for compliance with the Digital Markets Act » sur son blog officiel, détaillant les mesures prévues pour se conformer au Digital Markets Act (DMA) européen. Par la suite, le 17 janvier 2024, Google a annoncé plusieurs modifications de son moteur de recherche pour respecter les exigences du DMA.
En mars 2024, la Commission européenne a organisé une série d'ateliers publics pour évaluer la conformité des grandes entreprises technologiques au DMA. Ces ateliers visaient à recueillir les retours des utilisateurs et des entreprises concernées. Cependant, une recherche menée par Corporate Europe Observatory, LobbyControl et SOMO a révélé qu'environ 20 % des participants avaient des liens directs avec les GAFAM, souvent non divulgués, ce qui a potentiellement biaisé les débats.
En mars 2024, Apple a soumis un document à la Commission européenne exprimant sa position sur sa mise en conformité avec le Digital Markets Act tout en cherchant à protéger la sécurité et la confidentialité des utilisateurs en Union européenne. Avec ce document, Apple prévient que ces changements diminueront la protection des utilisateurs européens par rapport au reste du monde.
En mars 2024, la Commission a ouvert des enquêtes pour examiner d'éventuelles violations du DMA par Apple, Google et Meta. Ces enquêtes portent sur des pratiques telles que l'auto-préférence dans les services de recherche et les modèles publicitaires conditionnant l'accès aux services.
En parallèle, les GAFAM ont continué la promotion de leurs services à travers des acteurs économiques européens.
Le 24 avril 2024, dans l'épisode S02E05 du podcast « Deez is la tech », les intervenants de Deezer discutent de leurs collaborations avec les GAFAM). Ils ont souligné l'importance de ces partenariats pour offrir une expérience musicale fluide sur divers appareils et plateformes.
Deezer a intégré ses services sur des enceintes connectées comme Amazon Echo et Google Home, permettant aux utilisateurs de contrôler la musique via des commandes vocales. Ces collaborations sont présentées comme stratégiques pour étendre la présence de Deezer et améliorer l'expérience utilisateur.
Le 16 mai 2024, sur la chaîne Youtube d’Amazon Web Service France, on peut voir une vidéo faisant de la promotion de la collaboration entre AWS et un de ses clients, Ubisoft. Dans ce témoignage, Stéphanie Perotti, SVP Online Services d'Ubisoft, présente la collaboration de ses équipes avec AWS pour améliorer l'expérience en ligne de millions de joueurs. Cette collaboration a permis de développer et de transformer l'approche DevOps
Lors d’un événement AWS Summit Berlin qui s’est tenu en mai 2024, Amazon a invité Zalando à présenter un témoignage sur l’utilisation des services AWS pour améliorer sa logistique.
En septembre 2024, Amazon a organisé une visite de ses centres logistiques pour des journalistes européens, mettant en avant les emplois créés et ses pratiques écologiques.
Pour autant, à la suite de plusieurs plaintes déposées auprès de la Commission européenne par des entreprises, des associations d'entreprises, des associations de consommateurs et des autorités nationales de concurrence, Google a été condamnée à une amende de 2,4 milliards d'euros par la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dans un arrêt du 10 septembre 2024 pour abus de position dominante. Cette décision a fait suite à une enquête de la Commission européenne qui avait conclu que Google favorisait son propre service de comparaison de produits, Google Shopping, au détriment de ses concurrents. Concrètement, Google présentait les résultats de son comparateur de produits en première position et les mettait en valeur dans des encadrés attrayants, reléguant les services concurrents à des positions moins visibles. Cette pratique a été jugée anticoncurrentielle, car elle faussait le marché en avantageant indûment les services de Google.
En septembre 2024, une trentaine d'entreprises technologiques, dont Meta et Apple, ont accusé les régulations européennes d'étouffer l'innovation et de rendre l'Europe moins compétitive dans le domaine de l'intelligence artificielle (IA). Meta a suspendu le lancement de son assistant IA, Meta AI, en Europe, tandis qu'Apple a reporté celui de son assistant Apple Intelligence et d'autres fonctionnalités de l'iPhone 16, invoquant des "incertitudes réglementaires" liées au DMA, et accusant l’Europe de « rejeter le progrès ».
Dans un rapport publié le 1er novembre 2024, Apple a fait le point sur sa conformité avec le DMA notamment par rapport à son système fermé. Le DMA exige des modifications de ce système qui entraînent, selon Apple, des risques accrus pour les utilisateurs et les développeurs. Il s'agit notamment de nouvelles voies pour les logiciels malveillants, les fraudes et les escroqueries, les contenus illicites et préjudiciables, ainsi que d'autres menaces pour la vie privée et la sécurité. Toujours selon Apple, ces changements compromettent également sa capacité à détecter, prévenir et prendre des mesures contre les applications malveillantes sur iOS et iPadOS, et à aider les utilisateurs touchés par des problèmes liés à des applications téléchargées en dehors de l'App Store.
En janvier 2025, les nouvelles règles de Meta ont suscité certaines préoccupations sur la modération des contenus aux États-Unis, qui ne s'appliqueraient pas dans l'Union européenne. Cette distinction a ouvert un débat sur la conformité de Meta avec les réglementations européennes en matière de services numériques. Même si l’UE n’est pas directement concernée par ces nouvelles règles de modération aux États-Unis, l’Europe surveille attentivement les décisions de Meta pour s'assurer qu'elles ne fragilisent pas la lutte contre la désinformation.
En janvier 2025, une coalition de 39 ONG a exhorté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, à résister aux pressions de personnalités telles que Donald Trump et Elon Musk, qui tentaient d'affaiblir l'application des régulations numériques de l'UE. Cette situation illustre comment des campagnes médiatiques et des pressions politiques peuvent être orchestrées pour influencer les décisions réglementaires.
Le 12 février 2025, un article publié sur le blog de Google Cloud a détaillé un partenariat stratégique entre Deutsche Bank et Google Cloud pour moderniser l’infrastructure informatique de la banque et accélérer sa transformation numérique.
Dans un communiqué de presse du 12 février 2025, EuroCommerce a indiqué que les nouvelles régulations pourraient nuire aux commerçants pour accéder à des marchés plus larges et entraîner une perte de compétitivité des commerçants européens.
Le Privacy Shield est un accord qui a été conclu le 1er aout 2016 entre l’Union européenne (UE) et les États-Unis pour encadrer le transfert des données personnelles des Européens vers les entreprises américaines.
Dans un arrêt du 16 juillet 2020, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a invalidé le Privacy Shield en raison du non-respect du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) du 27 avril 2016 et des droits fondamentaux des Européens. La Cour a considéré que les agences américaines (NSA,FBI) avaient un accès trop large aux données européennes et qu’aucune garantie n’était fournie sur l’exploitation de ces données.
Pour tenter de combler ces lacunes, un nouvel accord, le Data Privacy Framework, signé le 10 juillet 2023 vise à rétablir un cadre légal pour les transferts de données entre l’UE et les États-Unis. Il prévoit notamment à renforcer les restrictions sur l’accès des agences américaines aux données et à engager les entreprises américaines à respecter les règles de protection des données.
Pour autant, dès l’élection du Président Trump ces textes ont été mis à mal en menaçant d’appliquer des droits de douane supplémentaires sur les importations européennes en réponse aux régulations numériques de l’UE.
Le Président Trump a menacé également de supprimer les garanties posées par le Data Privacy Framework DPF, ce qui inquiète les experts en données personnelles. En effet, si l’administration Trump supprime les dernières barrières à l’exploitation des données, les entreprises américaines pourraient traiter sans restriction les informations personnelles des Européens, sans cadre juridique clair.
Et si le Président Trump retire les protections des données à la source, le DSA ne suffira plus dans ses objectifs car des milliards de données européennes seront récoltées et utilisées par les entreprises et agences américaines sans aucune restriction, soumettant davantage l’Europe à une surveillance américaine.
Manon Sieraczek-Laporte (MSIE45 de l’EGE)
Sources
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https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32022R1925
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https://corporateeurope.org/en/2021/08/lobby-network-big-techs-web-influence-eu
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