Yandex, la réponse russe dans la guerre du contenu numérique

S’il est clairement admis que la zone d’influence majoritaire de Yandex est la Russie, il est aussi visible que l’expansion du nombre de ses filiales sur le territoire national et hors de celui-ci bénéficie à la société mais aussi au Kremlin. Du fait de son réseau tentaculaire, il est rare qu’il se passe une journée sans qu’un Russe n’utilise un des services de Yandex, alimentant ainsi la base de données détenue par la société renforçant de fait l‘encerclement cognitif établi.

Dotée d’une capitalisation boursière actuellement évaluée à près de 25 milliards de dollars, Yandex a connu un développement financier rapide depuis son introduction au NASDAQ en 2011. Durant l’année 2020, la capitalisation de la société a augmenté de 151% en l’espace de trois trimestres, bénéficiant sans aucun doute de la crise de la Covid-19. Ces données macroéconomiques cachent cependant un actionnariat complexe, ouvert à des entités extérieures à la Russie, mais verrouillé par les fondateurs historiques du groupe. Fondée cette année, la Fondation d’utilité publique est venue renforcer le contrôle du Kremlin sur la direction des affaires. Celle-ci s’adosse à une gouvernance remaniée l’an dernier, comprenant plusieurs personnes politiquement exposées. Par conséquent, cet ensemble est destiné à préserver la société de l’influence ou de l’emprise de puissances étrangères, tout en consacrant la souveraineté de la Russie dans le champ informationnel.

Depuis 2010, on remarque un développement croissant des outils législatifs afin d’encadrer les entreprises du numérique russe. L’impact de ces lois a affecté Yandex et a entravé une partie de son développement, notamment à l’international. Cependant, la mise en place d’une stratégie de gestion des données adaptée, a permis de développer une base de données conséquente, convoitée par le gouvernement pour son potentiel dans la guerre informationnelle. Yandex a plusieurs fois été contraint de céder certaines données de ses utilisateurs au gouvernement russe, sans pouvoir s’y opposer sous peine de sanctions financières. La stratégie de Yandex sur l’usage des données est directement subordonnée à celle du gouvernement et son autonomie continue de décroitre au fil des nouvelles lois.  

La stratégie d’influence du consommateur s’inscrit dans un système de dépendance durable, dont la stratégie repose sur le principe de l’accoutumance afin de créer son propre mode de consommation. Le système éducatif et la création d’algorithmes des moteurs de recherches reposent sur une stratégie plus long-termiste. Outre le cyberespace, la capacité de résilience de Yandex peut également s’exprimer à travers la guerre hybride. En effet, dans un contexte de guerre de l’information, la Russie se trouve entre la Communauté des États Indépendants (CEI), les anciens pays du bloc soviétique et le bloc occidental. L’Ukraine et la Géorgie, anciens pays membres de la CEI démontrent l’impuissance de la Russie et donc de Yandex à garder une mainmise sur ces pays qu’elle contrôlait autrefois. Dans une volonté de réaffirmation de la puissance russe, cette dernière instrumentalise Yandex à des fins d’influence quitte à en venir à la manipulation de l’information.

Rapport réalisé par
Clément Bertaux, Rémi Martin, Valentin Louvel, Carla Lepers,
étudiants de la 24ème promotion SIE
Alina Bagaeva, Maëllis Callé, Maël Caillette, Valentin Fauvel,
étudiants de la 3ème promotion RSIC
Titouan Le Ménès
étudiant de la 4ème promotion RIE

Lire le PDF : L’impérialisme des géants du numérique (ege.fr)