L’offensive informationnelle autour du « référendum pour les animaux »

Le 2 juillet 2020, est lancée devant le grand public une grande campagne médiatique visant à promouvoir la proposition de référendum d’initiative partagée relative au bien-être animal. Plus connue sous le nom de « Référendum pour les animaux » utilisé par les instigateurs du projet, cette proposition s’inscrit dans le mouvement plus général de la société qui voit s’imposer de plus en plus dans le débat public la question du bien-être animal, mobilisant personnalités médiatiques, politiques, associations et ONG. Preuve du poids croissant de cette question, elle se traduit aujourd’hui en mouvements politiques, comme l’illustre l’émergence du médiatique Parti Animaliste caractérisé par ses résultats électoraux notables. L’actualité législative l’illustre également avec la proposition de loi contre la maltraitance animale actuellement débattue au Parlement, et sur laquelle la commission mixte paritaire vient de trouver, le jeudi 21 octobre, un accord qui réjouit ses partisans.

Comme le revendiquent les activistes impliqués dans toutes ces opérations médiaticopolitiques, le bien-être animal est une préoccupation partagée par une large majorité de Français et, à priori, ne devrait pas constituer un sujet clivant. Il mobilise cependant des acteurs bien précis, et derrière les motifs consensuels, c’est en fait l’alliance de groupements d’intérêts financiers et de la sphère activiste végan, antispéciste et abolitioniste, liée aux diverses émanations de l’idéologie « woke » qui se dessine, en usant d’une stratégie de conquête bien élaborée, basée sur une offensive informationnelle médiatique déterminée.

Le référendum d’initiative partagée

Un référendum d’initiative partagé, dont l’organisation est possible depuis le 1er janvier 2015, permet au corps électoral de soutenir une proposition de loi et d’organiser, selon certaines conditions, un référendum. La proposition de loi doit en effet recueillir le soutien d’un cinquième des membres du Parlement, soit 185 députés et sénateurs, puis d’un dixième du corps électoral, soit plus de 4,7 millions de citoyens, pour être examinée en Parlement, et, si besoin, soumise au référendum, le tout sous le contrôle du Conseil constitutionnel et encadré par des règles précises.

On le constate aisément, ces conditions peuvent être difficiles à satisfaire. Certes, dans l’esprit du législateur, probablement, cela garantit que la proposition de loi porte sur un sujet suffisamment important et rassembleur pour mobiliser une telle partie de la population et du corps législatif, la participation de 185 de ses membres étant le gage d’une certaine modération. Cependant, on constate rapidement que pour être mené à bien, un tel projet nécessite une couverture publique et médiatique importante et que les affrontements informationnels le concernant sont un enjeu majeur. Il est à noter que depuis la réforme constitutionnelle, aucun projet de RIP n’a été mené à son terme.

Les acteurs à l’origine du RIP pour les animaux

Par conséquent, pour organiser un évènement d’une telle ampleur, sans le secours des réseaux classiques, il est nécessaire qu’un certain nombre d’acteurs se mobilise. Dans le cas du « référendum pour les animaux » une véritable galaxie se dessine, que l’on peut retrouver sur leur site : parlementaires, bien sûr, hommes d’affaires, célébrités, mais surtout un vaste ensemble d’associations, de collectifs et d’ONG engagés dans le business du bien-être animal. Cependant, plus précisément, on retrouve quelques acteurs à la manœuvre. Le trio d’hommes d’affaires médiatiques millionnaires (a minima) constitué de Xavier Niel, de Marc Simoncini et de Jacques-Antoine Granjon assure le financement premier et s’engage médiatiquement pour porter ce projet. Les différents membres de ce triumvirat possèdent notoirement des actions dans des groupes de presse à grande audience[1]. Hugo Clément, journaliste people, devenu depuis quelques temps militant actif de la cause animale, assure le rôle de figure de proue médiatique, par le biais notamment de ses interventions sur les plateaux de télévision ou dans les journaux, ou plus directement, par l’intermédiaire de ses populaires réseaux sociaux[2]. Il occupe également le rôle de coordinateur des diverses associations soutenant ce RIP. Leur importance, et surtout leur implication sont inégales, et il particulièrement intéressant d’observer de plus près quel est leur rôle réel et quelle petite minorité agissante se retrouve derrière les décisions.

Les mesures du RIP pour les animaux

Les mesures préconisées par le projet de référendum sont d’ailleurs intéressantes. Au nombre de six, elles visent les sujets suivants : interdire l’élevage en cage, interdire les élevages à fourrure, notamment celui des visons, mettre fin progressivement à l’élevage intensif, interdire la chasse à courre, par déterrage et les chasses traditionnelles, interdire les spectacles avec animaux sauvages, et mettre fin aux expérimentations sur les animaux. Ces sujets intéressent particulièrement l’opinion publique, cette dernière se montrant par exemple de plus en plus soucieuse de la qualité de son alimentation, et ils font l’objet d’actions de nombreuses associations dédiées, qui utilisent leur puissante force de frappe médiatique pour mener des campagnes basées sur des images percutantes, engageant l’émotion des spectateurs et sollicitant leur indignation. L214, par exemple, s’est plusieurs fois distinguée en diffusant des enregistrements vidéos de scènes captées dans des abattoirs ou des zones d’élevage intensif.

 Le sujet n’est pas étranger au législateur, puisqu’un projet de loi « contre la maltraitance animale » est actuellement étudié au Parlement, visant exactement ces questions. L’accord ayant cependant été trouvé en commission mixte paritaire n’englobe pas tous les thèmes traités par le RIP : la sortie de l’élevage intensif ou en cage, l’interdiction des chasses traditionnelles ou encore de l’expérimentation animale ayant été laissées pour l’instant de côté. Cette proposition de loi réjouit cependant les partisans et initiateurs du RIP, notamment son champion parlementaire, rapporteur général du rapport préliminaire, Loïc Dombreval, surnommé par certains médias le « député des animaux ». De fait, les mêmes acteurs associatifs liés au référendum se sont retrouvés impliqués dans ce projet de loi. Dans les annexes du rapport préliminaire se retrouve la liste des personnes auditionnées durant sa rédaction. On y retrouve les responsables des principaux mouvements initiateurs du RIP[3].

Une forte présence d’activistes « végans, antispécistes et abolitionistes »

Ces personnalités apparaissent donc omniprésentes. Il semble logique, dans le cadre d’un tel rapport, que c’est leur expertise de spécialiste de la protection animale qui leur vaut audition. Cependant, certaines de ces personnes semblent présenter un profil plus militant que technique. On peut par exemple citer le cas des responsables du projet Rewild, Lamya Essemlali et Jérôme Pensu. Rewild est né de la coalition de plusieurs associations, qui, en 2019, s’est portés acquéreuse du zoo de Pont-Scorff pour y bâtir un projet de « ré-ensauvagement » d’animaux captifs. Lorsqu’on constate le fiasco que fut la reprise de ce zoo, on peut s’interroger sur leurs réelles compétences[4]. De plus, une étude rapide du profil de Lamya Essemlali révèle son caractère nettement militant. Fondatrice de Sea Sheperd France, qu’il est commode de présenter au public comme la filiale française de l’ONG Sea Sheperd[5], elle est également vice-présidente du parti Révolution écologique pour le vivant, fondé par Aymeric Caron, qui professe ouvertement une idéologie antispéciste. On retrouve également un certain nombre d’autres personnalités également engagées pour le RIP. Ils ont comme caractéristique commune de se rattacher au mouvement végan antispéciste abolitioniste dans sa frange la plus radicale, et d’appartenir aux mêmes associations. A l’image de Lamya Essemlali liée ouvertement à trois d’entre elles, on retrouve fréquemment les mêmes profils dans des associations différentes.

Le mouvement végan antispéciste abolitioniste forme une galaxie complexe, qui peut facilement se confondre avec un intérêt pour les animaux, l’écologie ou les bienfaits du végétarisme. Ses racines philosophiques et idéologiques sont cependant toutes autres. Si sa version la plus extrême ne concerne peut-être qu’une frange de ceux qui s’en réclament, l’idée principale est de reconnaitre à la vie animale une valeur égale à celle de l’homme et, par conséquent, de refuser d’utiliser tout produit qui serait issu de l’exploitation animale, cette dernière étant considérée comme le plus grand crime de masse de tous les temps. Au-delà d’une mode, il s’agit surtout d’une rupture anthropologique majeure, qui reconsidère la place de l’Homme et son rapport à la Nature, d’autant que les penseurs liés à ce mouvement développent facilement des argumentations qui vont à l’encontre des normes traditionnellement admises dans les sociétés humaines[6]. Ce mouvement est lié, à la fois idéologiquement, mais aussi dans ses réseaux et ses façons d’agir, au « wokisme » et aux luttes de justice sociale américaine, et on retrouve les mêmes méthodes de subversion à l’œuvre[7].

Des intérêts financiers derrière le RIP pour les animaux

Le véganisme est en effet porteur d’un projet qui remettrait totalement en cause les fondements des sociétés humaines et impliquerait donc un bouleversement majeur. C’est l’idée que l’on retrouve derrière la mouvance abolitioniste qui veut abolir toutes barrières entre les animaux et les « animaux humains ». Cela signifie donc, outre la fin de l’utilisation de tous produits d’origine animale, la fin du système agricole actuel, donc d’un système économique touchant des millions d’individus, et nourrissant la totalité de la population terrestre. Plus anecdotiquement, mais très important également, cela signifierait également la fin d’un ensemble d’autres systèmes économiques : autour de l’équitation, des animaux de compagnie, mais aussi de la pharmacie, des cosmétiques... Il faut cependant bien noter qu’un tel projet aussi conséquent implique également l’ouverture de nouveaux marchés aux investisseurs en recherche d’avenir.

La résonnance de ces mouvements a ouvert le vaste marché des produits végans. Dans les fonds d’investissement et de recherche, on propose déjà les solutions de la viande végétale ou artificielle, et ce sont des sommes colossales qui sont en jeu. C’est probablement la raison de la participation des trois millionnaires au RIP. Peu suspects, il y a encore quelques mois, de sympathie pour la cause animale, ils sont régulièrement accusés par leurs opposants de greenwashing, c’est-à-dire de cacher leurs intérêts privés sous la caution morale des préoccupations écologiques[8]. Xavier Niel, par exemple, dit avoir pris conscience du problème du bien-être animal devant les vidéos de L214.

 Ses opposants lui reprochent cependant d’être toujours amateur de courses hippiques, et propriétaire d’une écurie, alors que les conditions de vie des chevaux de courses sont régulièrement dénoncées par les associations de protection animale. De même, sa femme, Delphine Arnault, est directrice adjoint de Louis Vuitton, l’enseigne de luxe organisant régulièrement des défilés avec cuirs et fourrures. Enfin, sur les réseaux sociaux, on s’échange des photos de Marc Simoncini ou de Jacques-Antoine Granjon posant au côté de trophées de chasses d’espèces africaines aujourd’hui protégées[9]. En fait, pour les hommes d’affaires que sont Xavier Niel, Marc Simoncini et Jacques-Antoine Granjon, le marché des produits végans et de la nouvelle agriculture est probablement tout à fait tentant. Pour y accéder, et s’assurer de son exclusivité, il faut faire passer un certain nombre de mesures qui auront pour effet, bien que drapées sous le paravent de la cause animale, d’étouffer le système agricole français actuel et de laisser de précieuses parts de marché. Privé de ses capacités de production par les mesures de plus en plus contraignante, voire interdit in fine, l’élevage français serait alors menacé de disparition.

Xavier Niel est notoirement un investisseur actif dans les marchés des nouvelles viandes, et un soutien de la nouvelle agriculture : il a financé l’entreprise Les Nouveaux Fermiers, productrice de viande végétale, éveillant l’ire des réseaux d’éleveurs traditionnels, et a lancé en vallée de Chevreuse un projet de « campus agricole », une ferme-école, accusée par les mêmes d’être porteuse de cette idéologie. Le RIP pour les animaux est donc une occasion très intéressante pour eux, et à la lumière de ces évènements, on comprend mieux cette alliance avec les réseaux végans, dont les représentants, certes probablement portés par leur ambition personnelle, semblent eux être également motivés par leurs projets idéologiques.

Un cas d’école de manœuvres subversives visant à imposer une idéologie

Le RIP pour les animaux est donc une parfaite étude de cas des manœuvres subversives menées par ces activistes. Pour imposer leurs thèmes, les auteurs du projet vont utiliser leur force de frappe médiatique. Elle est facilitée par la personnalité de leurs trois sponsors, liés à divers organismes de presse, tandis qu’une figure people, Hugo Clément, assure la façade médiatique, secondé par de nombreuses personnalités du show-biz qui apportent leur soutien, inspirant par leur puissance de persuasion confiance aux citoyens, appelés à prendre parti pour le RIP. De même, les diverses associations apportent également leur force de frappe médiatique, ainsi que leur crédibilité.

Le tour de force du RIP pour les animaux est de recueillir le soutien d’associations puissantes et populaires, telles la fondation Brigitte Bardot ou 30 millions d’amis, qui ne sont pas à l’origine du projet. Cela inspire confiance, quant au sérieux de l’entreprise, tant à la population qu’au reste du réseau associatif. Concernant les thèmes de la campagne, ils visent des sujets facilement pris en otage par l’émotion, répondant à une réelle préoccupation citoyenne, le tout aidé par des techniques bien rodées, tel le choix du vocabulaire ou des images, qui bloquent le débat en le rendant impossible[10]. L’exemple le plus révélateur est le nom médiatique choisi pour la proposition de projet de loi : le référendum « pour » les animaux. Qui ne voudrait pas être « pour » les animaux ?

Et qui se risquerait par conséquent à être « contre » ? Les thèmes et mots-clefs principaux sont par la suite répétés et martelés, chacun étant appelé à les diffuser à son échelle. Ils sont utilisés comme des slogans, empêchant tout débat, imposant leur supériorité morale et leur légitimité et évitant que l’on s’intéresse aux enjeux cachés.

De plus, dans son déroulé narratif officiel, le projet de loi est présenté selon une stratégie de rapport « du faible au fort ». Cela ancre dans l’opinion publique qu’il s’agit d’un combat de David contre Goliath : de bénévoles et bienveillants membres de la société civile vont s’engager dans un combat héroïque et difficile pour une cause juste contre « le Mal » et des réseaux puissants et malveillants. La page Wikipédia du RIP pour les animaux, est à ce titre exemplaire. Sous couvert de neutralité, elle fait la part belle aux oppositions et aux attaques de lobbying d’ennemis identifiés : politiques, éleveurs, chasseurs. Elle reste cependant muette sur les contradictions des porteurs du projet. Le deuxième volet de ce rapport faible/fort est également l’optimisme présenté, ce qui n’est pas contradictoire avec la faiblesse apparente du « camp du bien ». C’est le message porté par la communication enthousiaste du RIP : en s’alliant les « petits » peuvent faire changer les choses[11]. L’un des arguments phares des défenseurs du RIP dans les médias est la popularité de ses questions : 80% des Français, selon des sondages, soutiendrait le sens des mesures du référendum. A priori, il ne devrait donc pas être difficile d’obtenir les signatures… La réalité semble autre. De plus, dans un réflexe commun de psychologie des foules, un tel argument tend à provoquer l’adhésion, par réflexe grégaire et pour coller au sens de l’histoire. La technique de communication du RIP pour les animaux est donc particulièrement rodée.

Une autre technique de subversion utilisée pourrait s’apparenter à la technique du « pied dans la porte ». Pour faire avancer leurs thèmes, qui, dévoilés tels quels pourraient heurter la plus grosse part de l’opinion publique, tant dans ses tréfonds philosophiques (valeur de la vie humaine), que dans ses coutumes (traditions et pratiques alimentaires, organisation économique), les militants antispécistes préfèrent une stratégie par étape, imposant peu à peu leurs idées, en pariant sur un lent glissement juridique et d’opinion, comme l’affirme dans une interview au Monde « Amadeus Humanimal VG », activiste médiatique. Ainsi, bien que les questions soulevées dans la proposition de projet de loi ne correspondent pas entièrement aux volontés végans, en restant bien trop timorées, elles sont soutenues par tout le réseau, qui parie sur leur acceptabilité pour faire avancer leurs idées.

Les résultats limités de la campagne de mobilisation

A ce stade, on peut s’interroger sur le succès de cette opération. Depuis le 2 juillet 2020, soit plus d’un an et trois mois, malgré le nombre et le prestige des acteurs impliqués, la débauche médiatique et la communication rodée, il n’y a encore que 152 parlementaires signataires sur les 185 nécessaires, et moins d’un million de promesses de signatures, sur les 4,7 exigées. Certes la PPL sur la maltraitance animale est venue remettre un coup de projecteur sur ces sujets, mais plusieurs opposants au référendum se félicitent de ce qu’ils voient comme un échec, d’autant que face à une certaine opposition, une dizaine de parlementaires ont retiré leur soutien. D’ailleurs si la départ se fit en fanfare, avec près de 800 000 soutiens en moins de trois mois, la dynamique s’est vite essoufflée : un an après cette date symbolique des trois mois, le million n’est toujours pas atteint, ce qui contrarie les projections les plus optimistes. Pourtant ce ne sont pas les contre-mesures de ces opposants qui ont permis cette semi-défaite. Au contraire, ils sont apparus particulièrement inaudibles et aucun n’a émergé comme un opposant crédible[12].

Les réseaux d’influence des chasseurs et des agriculteurs sont plutôt bien introduits dans certains milieux politiques, ce qui a pu leur être bénéfique, mais leurs échos médiatiques se sont révélés bien en-deçà de ceux du camp adverse, si ce n’est complètement nuls. Surtout ils n’ont généré presque aucun discours qui pourrait efficacement contrer l’opération de subversion à laquelle ils faisaient face. Pour la majorité d’entre, ils ne l’ont probablement même pas identifiée. Les quelques thèmes qui pourraient s’apparenter à un tel discours se rapproche plutôt de discours type lutte des classes (contre les mainmises de « milliardaires ») ou à une défense des traditions assez conventionnelle. On peut toutefois noter l’émergence de quelques « lanceurs d’alerte », à la relative portée médiatique[13]. Mais cela n'a pas empêché les thèmes portés par le RIP pour les animaux de se propager dans l’opinion publique.

Le succès réel des activistes végans antispécistes et abolitionistes

La principale manœuvre de subversion des acteurs du RIP pour les animaux est en réalité bien plus profonde. Outre les intérêts financiers immédiats ou futurs, ou la lente imposition des idées végans, antispécistes ou abolitionistes dans la société, ce projet de proposition de loi révèle surtout une véritable opération d’intrusion d’un certain nombre d’individus dans les alentours de l’environnement décisionnel. Ces personnes, tenants de l’idéologie végan et militants actifs ont en fait réussi à pirater les acteurs plus traditionnels de la cause animale et à bénéficier de leur respectabilité tout en les évinçant. L’étude de la cartographie en annexe révèle la prédominance d’une petite minorité d’activistes, qui gravitent dans les mêmes associations, et recoupent leurs réseaux (en étant membres chacun de plusieurs associations par exemple). Parfois réellement incultes dans le domaine de l’étude des animaux, ils bénéficient toutefois de l’expertise de spécialistes, dont ils utilisent les discours en en recueillant tous les lauriers, organisant colloques et étant convoqués lors des diverses auditions[14]. De plus, leurs sources de financement sont communes, jusqu’à remonter jusqu’à l’Open Philanthropie Project. La cartographie en annexe présente de manière non exhaustive les plus importantes de ces personnalités[15].

Les grosses associations de bien-être animal, comme la Fondation Brigitte Bardot, ou 30 millions d’amis, se consacrant originellement aux animaux domestiques, ne sont pas à première vue concernées par les mesures du RIP pour les animaux. Attirées cependant par « l’union sacré » de la cause animale, elles apportent leur crédibilité devant l’opinion publique ainsi que leurs nombreux adhérents. Ces derniers, qui, même s’ils peuvent être loin de partager les opinions extrémistes végans, apportent leur puissance financière et leur soutien, tout en étant exposés, notamment par le biais des réseaux sociaux, à une lente contamination par les idées antispécistes.

Cela explique le soutien d’associations qui n’ont rien à voir avec le référendum. L’un des exemples le plus frappant est Alliance Anti-Corrida. L’une des plus grosses associations anti-corrida, soutient le référendum alors que ce dernier ne s’attaque en aucune façon à la tauromachie. De plus, le ralliement entier de l’écosystème des associations de protection animale condamne toute association, même réticente, à suivre le mouvement, sous peine de sembler refuser de soutenir un projet visant à améliorer le sort des animaux.

En définitive, les personnes et institutions apparaissant sur la cartographie ont maintenant réussi à s’imposer comme uniques interlocuteurs de la cause animale. Un petit groupe se partage les « marchés » du business de la cause animale, selon les secteurs, en accaparant visibilité médiatique, places, financements et orientations stratégiques. Le demi-échec du RIP importe peu. Les consultations législatives et politiques sur la question animale et les campagnes lancées à destination du public en France se font dorénavant en concertation auprès des militants végans antispécistes abolitionistes les plus radicaux.

 

Hubert le Gall
étudiant de la formation initiale SIE25

 

[1] Au-delà du storytelling médiatique, c’est bien Xavier Niel à l’origine de l’association servant de support administratif : l’Association de défense de la cause animale (ADCA), enregistrée le 24 janvier 2020 à la préfecture de Paris, dont la présidente est l’ancienne femme de Xavier Niel, et la trésorière sa sœur.

[2] Hugo Clément, journaliste et activiste jouit d’une belle popularité, notamment en ligne. Son portrait dans Libération est assez révélateur. Il est également fréquemment soupçonné de piller le travail des autres, ou du moins de s’en inspirer fortement.

[3] Code animal : Mme Alexandre Morette. Animal Cross, M Benoît Thomé, président. M Romain Espinosa, chercheur au CNRS, coordinateur des « vingt mesures pour les animaux ». CAP – Convergence Animaux Politique, M Milton Frederici, chargé des affaires publiques. Evolution Condition animale, (ECA) Mme Fabienne Roumet. Paris Animaux Zoopolis, (PAZ) Mme Amandine Sanvisens, cofondatrice. Cirque d’Hiver Bouglione, M. Joseph Bouglione et Mme Sandrine Bouglione. One Voice Mme Muriel Arnal, présidente.

Rewild, Mme Lamya Essemlali et Jérôme Pensu, co-fondatrice et administrateur.

[4] Le projet, malgré son storytelling séduisant, s’est vite transformé en cauchemar, entre les dissensions entre fondateurs et les graves problèmes de gestion qui ont suscité l’ire de la préfecture.

[5] C’est une technique classique : une association française reprend le nom d’une association célèbre internationale. En accolant le mot France, elle laisse planer le doute, comme si elle était une antenne locale, ce qui lui fait bénéficier de la réputation de l’association « mère ». C’est le cas de PETA France.

[6] Peter Singer en est l’exemple caractéristique.

[7] Le véganisme antispéciste abolitioniste (VAA), pour qui la consommation de viande ou l’élevage bovin sont des « viols » bénéficie de l’intersectionnalité et se présente comme un mouvement antisexiste, anti patriarcal, anticapitaliste et bien-sûr antiraciste, le racisme ultime étant celui évinçant les animaux.

[8] Hugo Clément a subi les mêmes attaques ; accusé d’être végétarien par opportunisme, ou d’accepter de participer à l’émission Fort Boyard, alors que des animaux y sont exploités.

[9] Voir les photos en annexe 1. Sur les accusations des opposants : voir  Xavier Niel et Jacques-Antoine Granjon.

[10] Les images choquantes utilisées dans la communication du RIP en sont le parfait exemple.

[11] C’est le sens de ce genre de vidéos.

[12] En plein début de campagne pour le RIP, Éric Dupont Moretti, tout fraichement nommé garde des sceaux, a été pris dans un scandale pour avoir préfacé l’ouvrage de Willy Schraen, président de la Fédération nationale des chasseurs, Un chasseur en campagne, et y avoir invectivé les écologistes. De son côté, Willy Schraen s’est distingué en appelant les parlementaires signataires du RIP à « rendre leur mandat ».

[13] On peut citer sur YouTube, principalement, Richard sur Terre et Pas Vegan.

[14] C’est le témoignage d’un expert ayant été « utilisé » par ces activistes : l’ayant enregistré, et ayant profité de sa respectabilité, ils l’ont par la suite réduit au silence en s’imposant eux-même comme « experts ». Le profil des activistes est d’ailleurs souvent très peu scientifique (souvent de formation juridique ou en sciences politiques), d’où leur -possible- incompétence. On peut songer à Milton Federici.

[15] Cartographie en annexe 3.

 

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