Santé et puissance : repenser la souveraineté stratégique française

Dossier de synthèse des travaux de l'exercice QuestIE qui a mobilisé quatre promotions d'étudiants de l'Ecole de Guerre Economique pendant le mois de décembre 2025. Ont participé à ces travaux, les deux promotions de notre parcours d'excellence RensIE et SIE, et les deux promotions de notre parcours alternance RIE et RSIC.

Chaque promotion de l’École de Guerre Économique a exploré un champ de la santé comme enjeu de puissance. La santé n’est plus un simple domaine de politique publique, elle est devenue un espace de souveraineté, de compétition économique et de confrontation géopolitique.

Les travaux issus du QuestIE explorent, chacun à leur manière, les dimensions industrielle, diplomatique, numérique, cyber et informationnelle de cet écosystème stratégique.

En conjuguant recherche, cartographie d'acteurs, analyse et esprit d’équipe, les étudiants de l'EGE livrent un travail ambitieux : faire de la santé un levier de puissance française.

Nous avons retenus cinq points structurants leurs travaux :

L’économie de la santé : un géant endormi face à la concurrence mondiale

« La santé française souffre d’un manque de doctrine de puissance. »
— Extrait 

Le premier dossier rappelle un constat fort : si la France excelle dans la recherche médicale, elle manque d’une stratégie de puissance économique cohérente.
L’industrie pharmaceutique, longtemps centrée sur la chimie, a raté le virage des biotechnologies et des nouveaux modèles d’innovation.

Sous le poids des normes et de la concurrence étrangère, nos acteurs industriels se fragmentent. Pourtant, la France dispose de positions de pointe dans la bio-impression, la robotique médicale et l’intelligence artificielle appliquée à la santé.

Les travaux appellent à un changement de paradigme : passer d’une approche sectorielle à une approche stratégique, où la santé est pensée comme un pilier de la puissance économique nationale.

Pour aller plus loin
Les conséquences françaises d’un manque de stratégie de puissance dans le domaine de l’économie de la santé

La diplomatie sanitaire : entre influence et dépendance

« La diplomatie sanitaire française brille par son engagement, mais pêche par son manque de cohérence stratégique. »
— Extrait

Présente dans près de 193 pays, la France mobilise une diplomatie sanitaire dense — via l’OMS, les partenariats bilatéraux ou européens.
Mais ce rayonnement souffre parfois d’un décalage entre discours et moyens sur le terrain.

Les travaux soulignent l’importance de repenser la diplomatie sanitaire comme un outil d’intelligence et de rayonnement, intégrant communication stratégique, évaluation des partenariats et lutte contre la désinformation.
Une diplomatie de puissance, assumée et lucide, pour défendre les valeurs françaises dans un monde où la santé devient un levier d’influence géopolitique.

Pour aller plus loin
Influence des Etats dans la politique de santé mondiale

Santé numérique : catalyseur d’innovation et enjeu de souveraineté

« L’IA, les objets connectés et la télésanté sont les piliers d’une nouvelle souveraineté technologique. »
— Extrait 

La pandémie de Covid-19 a accéléré la numérisation du système de santé.
De la téléconsultation, les innovations se multiplient, redéfinissant le rapport entre patients, médecins et institutions.
Mais cette transformation s’accompagne de nouveaux défis éthiques et géopolitiques : dépendance technologique, captation des données, régulation européenne.

Les travaux appellent à la création d’une stratégie nationale de la santé numérique, articulant innovation, souveraineté technologique et cadre réglementaire protecteur.
L’objectif : faire de la France non pas un marché, mais un modèle de puissance numérique en santé.

Pour aller plus loin
Les enjeux stratégiques de la France dans la santé numérique

Cybermenaces : les hôpitaux au front d’une guerre invisible

« La santé française ne manque pas de volonté, elle manque de moyens. »
— Extrait 

De Brest à Marseille, les cyberattaques contre les hôpitaux se multiplient.
Ces attaques ciblent les données les plus sensibles de notre société, paralysent les soins et mettent en péril la confiance du public.
Malgré l’action de l’ANSSI et le programme CaRE, le constat est clair : la résilience numérique du secteur de la santé reste insuffisante.

Les travaux alertent sur la nécessité d’un sursaut stratégique : sanctuariser les infrastructures hospitalières, former les équipes et créer une doctrine cyber spécifique à la santé.
Protéger le système de santé, c’est désormais protéger la Nation.

Pour aller plus loin
La prise en compte des attaques cyber pour protéger le secteur de la santé

Données de santé : le nerf de la souveraineté nationale

« La donnée de santé est la matière première de la médecine du futur, mais aussi un enjeu de souveraineté. »
— Extrait 

La donnée est au cœur de la puissance sanitaire.
En 2020, plus de 2 300 exaoctets de données de santé ont été produits dans le monde : un gisement colossal, convoité par les géants du numérique.

Les travaux rappellent que la maîtrise des données, de leur hébergement à leur interopérabilité, est une condition sine qua non de la souveraineté.
Ils notent les efforts du plan France 2030 et de l’AP-HP appelant à une stratégie d’indépendance numérique face aux clouds étrangers et aux standards non européens.

La santé ne se défend plus seulement dans les laboratoires : elle se défend désormais dans les serveurs et les infrastructures numériques.

Pour aller plus loin
Les enjeux stratégiques des données de santé pour la France

En conclusion

À travers ces études, les étudiants de l'Ecole de Guerre Economique livrent une vision transversale : la santé n’est pas un coût, mais un investissement stratégique ; pas une politique publique, mais un pilier de puissance nationale.

Leur démarche, à la croisée de l’intelligence économique, de la géopolitique et de la sécurité, appelle à une doctrine nouvelle : la puissance sanitaire française, fondée sur l’innovation, la souveraineté numérique, la résilience et la capacité d’influence.